Je fais partie de ceux qui ont été très heureux, ravis, enchantés, de l’élection de Poutine. En plus : au premier tour !
Sans être surpris. Ni de l’ampleur de son succès, ni de la fureur des occidentaux. Il fallait être à la solde de l’industrie de la propagande pour ne pas voir, ou reconnaître, la formidable popularité de Poutine en Russie. Un des rares en France à en témoigner, timidement face aux pressions ambiantes, fut Sylvain Tesson qui a vécu à plusieurs reprises dans la Russie profonde. (*)
Poutine n’est pas l’homme providentiel qui va sauver l’humanité. Tout simplement, un Homme d’Etat. Ce qui est déjà : énorme ! Pas un homme au pouvoir, en Occident, ne lui arrive à la cheville. Que dis-je : à la plante des pieds !...
Dans le meilleur des cas, ce ne sont que clowns pour shows télévisés à la Berlusconi ou Obama. Dans le pire, des psychopathes rêvant de détruire pays et nations en les pillant. Les candidats “milliardaires-républicains” aux primaires de l’élection présidentielle américaine, sombrant dans la surenchère belliciste et sanguinaire, révèlent l'étendue de ce désastre intellectuel et politique. Sans parler des « déglingués », drogués de violence et de paranoïa, dirigeant l’entité sioniste…
La campagne calomniatrice précédant et suivant son élection dans tous les médias, français et occidentaux dans leur ensemble, m’a particulièrement amusé. Les plus acharnés, en France, étant TV et radios du "service public" : JT, documentaires, émissions « culturelles ». Un implacable matraquage, à grandes louches de lamentations démocratiques. Ô rage ! Ô désespoir ! Le tyran est de retour !
Incapables de la moindre diversité ou équilibre dans l’information, de regrouper dans un panel des anti-Poutine hystériques, mais aussi des observateurs plus « objectifs ». Ce n’était que diffamation à jets continus : système Poutine, mafia Poutine, nouveau tsar, empereur, autocrate, etc. Conscience professionnelle ? Déontologie ? Aucune notion… Normal, vu l’état de notre “société de la désinformation”, corrompue de cynisme.
Manœuvres de déstabilisation et tentatives d’assassinat des occidentaux vont se multiplier, Poutine le sait. Ce qui l’encourage d’autant à poursuivre son œuvre de redressement, économique, politique et militaire, de la Russie. C’est une chance pour ce pays. Mais, aussi, pour les autres.
Incontestablement, l’équilibre mondial a besoin d’une Russie forte et prospère, pivot de stabilité entre Europe, Moyen-Orient et Asie. Sa pondération, mesure, sens des responsabilités, sont un atout pour la paix sur notre planète. Des fous veulent l’entraîner dans la guerre. Il fera tout pour l’éviter. S’il y arrive, nous lui en serons tous redevables.
A l’occasion de cette élection, des lecteurs m’ont demandé de republier le portrait de Poutine que j’avais rédigé dans un texte relativement ancien, au plus fort d’une campagne de dénigrement à son encontre : Poutine – Frankenstein et les Prédateurs. Du 20 avril 2007, cinq ans ! Ce que je fais volontiers, sans pouvoir cependant reproduire d’intéressants commentaires qui avaient été échangés à cette occasion (sur le “problème tchétchène”, notamment). D’après eux, il n’aurait pas pris une ride… Je les remercie de leur gentillesse et de leur intérêt.
(*) Je recommande la lecture de son récent et très beau livre, poétique et documenté, sur son séjour de 6 mois au bord du lac Baïkal : Dans les forêts de Sibérie, Gallimard, 2011.
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Poutine : Frankenstein et les Prédateurs...
Un spectacle qui me ravit, c'est celui des grandes orgues de la propagande.
Entendre et voir tous ces médias à l’unisson, sans fausse note, au même instant, soufflant, sous les doigts de leurs maîtres, dans les tuyaux vides du mensonge et de
la calomnie : fascinant !… Les partitions changent. Mais, connaissant son public, comme tout bon organiste, la propagande va et vient sur les classiques de son répertoire. Poutine, est une de ses partitions favorites. C’est, aussi, une de mes mélodies préférées…
Mélodie, de la
complicité politique et médiatique, dans cette relation fusionnelle de la manipulation de l’information, au service des intérêts économiques de leurs commanditaires. A lire, écouter tous ces
médias et politiciens, Poutine serait un monstre. Ne respectant aucune des libertés publiques élémentaires, pratiquant l’assassinat politique, méprisant les règles d'or d’une économie
libérale qui est censée servir de trame aux relations internationales, etc. Bref, c’est tout juste si Poutine n’a pas remplacé Staline dans la représentation, les stéréotypes et les
postures "démocratiques" des médias occidentaux.
Poutine serait : Frankenstein !...
Ce déchaînement sonore est trop fort pour ne pas dissimuler, en contrepoint, des mouvements plus subtils. Livrons nous à un petit exercice de musicographie, et
décryptons ces belles envolées… Décrypter est un régal !
En fait, la fureur de cette campagne de désinformation est fondée sur la frustration occidentale à l’encontre de la volonté d’un homme, s’appuyant sur une nouvelle
génération de responsables russes, décidé à sortir la Russie de la profonde crise de la fin du XX° siècle. La
conséquence immédiate est que les immenses projets de prédation, planifiés par le Big Business occidental à la suite de l’effondrement du régime communiste se sont, malgré d’excellents
débuts, trouvés rapidement bloqués par un homme : Poutine. D’où les campagnes hystériques se crispant sur cinq dénis :
1. Le déni d’un homme.
Tout opposant à l’hégémonie occidentale a droit automatiquement au qualificatif de "terroriste", dès lors qu’il possède un pouvoir potentiel de résistance. Difficile
de mettre Poutine sur une de ces listes. Alors, le plus simple est de le faire passer pour un criminel. Rien que cela… Autocrate et assassin.
Frankenstein, vous dis-je !
Pourtant, c’est un homme qui a été régulièrement élu à la tête de son pays, dans un gouvernement légitime. A deux reprises. Et les sondages, y compris ceux
supervisés par l’université d’Aberdeen (Ecosse), montrent un taux moyen de satisfaction de ses concitoyens, par rapport, à son action de 70%, en moyenne. Il n’y en a pas beaucoup sur cette
planète…
Il pratique couramment plusieurs langues, dont l’allemand qu’il maîtrise parfaitement. De même que tous les rouages de la Géopolitique. Gros travailleur, il connaît
ses dossiers sur le bout des doigts.
Il est vrai qu’il a tout pour agacer : il ne boit pas, ne fume pas. Ceinture noire de judo, il le pratique tous les matins, une heure, avant de commencer à
travailler. Pire : il est d’une rigoureuse intégrité. L’horreur : il se fait une haute idée de l’indépendance et de l’avenir de son pays !...
Atypique. Nos "Al Capone" dirigeant la « Communauté Internationale », et protégeant les pires dictatures en Afrique, en Amérique du sud ou au Moyen Orient,
n’en peuvent plus !… Poutine ? Un « Chavez » cool… Il ne manquait plus que cela… Un cauchemar !
2. Le déni d’un redressement politique.
La stratégie de l’Occident, à la chute du communisme était de faire éclater l’ex-URSS en une multitude d’Etats, d’entretenir des conflits à ses frontières pour la
paralyser, et de piller les énormes ressources de son sous-sol en installant et protégeant des gouvernement corrompus. A l’exemple de ce qui se fait de mieux sous d’autres latitudes. Cela a
failli réussir, comme le montre très clairement Joseph Stiglitz (1) : l’instabilité économique associée à une corruption organisée et à la mise en place d’une mafia, servant d’intermédiaires
aux intérêts occidentaux, a provoqué une violente régression de la Russie. Ce grand pays était au bord de l’anarchie…
i) Le pillage occidental par le biais de la mafia russe.
En fait, les privatisations accélérées, imposées par l’Occident via la Banque Mondiale et le FMI (2), n’avaient pas pour objectif de créer, ou de développer une
classe moyenne mais de faire acheter, par les multinationales, pour une bouchée de pain l’essentiel de la richesse du pays : pétrole, gaz, mines (fer, charbon, or, diamant, etc.). Cette
opération comportait deux étapes :
=> achats (ou "privatisations", par euphémisme...) par des mafieux à prix ridicules et, la plupart du temps, à crédit et sans apport de fonds
personnels...
=> rachats ensuite par des entreprises occidentales des parts à prix ridicules, aussi, mais qui, à l’échelle des transactions, constituaient des fortunes
colossales pour des personnes privées.
C’est ainsi que sous Eltsine, des pans entiers des ressources russes ont été bradés à des mafieux, moyennant commissions. Certains, par la suite, s’apprêtant à céder
leurs possessions nouvellement acquises avec une confortable marge, notamment dans le gaz et le pétrole, aux grandes multinationales. La Russie allait ainsi voir l’essentiel de ses richesses
rachetées à vil prix et possédées par des intérêts étrangers. Schéma classique des privatisations dans la plupart des pays en développement qui n’ont pas la taille critique pour résister. Mais,
la Russie n’est pas le Nigeria, l’Arabie Saoudite ou le Gabon...
ii) L’arrêt du pillage.
Succédant au gouvernement « ultracorrompu » d’Eltsine, la première tâche de Poutine fut de mettre un terme à ce pillage à grande échelle du pays. Il
fallait museler la grande mafia en cheville avec les multinationales étrangères. Certains de ces mafieux ont pu être arrêtés, jugés et les transactions en cours bloquées. Ce qui a fait hurler les
anglo-saxons au nom du "libéralisme économique" (3), des droits de l’homme et autres indignations "démocratiques"… La réaction allait être brutale. Du "grand ami" de l’après 11
Septembre, Poutine, allait immédiatement devenir l’homme à abattre.
Dans ce nettoyage, toujours en cours, un des plus brillants et des plus efficaces collaborateurs de Poutine, Andrei Kozlov, a été assassiné (4). Il avait retiré les
licences d’exploitation à 95 banques russes spécialisées dans le blanchiment de ce pillage. Il était en train de décortiquer les implications des multinationales de l’énergie dans le pillage et
les détournements de fonds. Malgré cette guerre souterraine et les opérations de déstabilisation organisées par les occidentaux, avec une campagne de dénigrement à l’échelon international,
Poutine et son équipe tiennent bon.
iii) La protection de la mafia russe par les
occidentaux.
Beaucoup de ces gangsters de haut vol se sont réfugiés en Occident, notamment à Londres, où, protégés par la City (milieux financiers) qui gouverne le pays, ils
mènent grand train de vie. Cette "protection" atteint des sommets inconnus jusqu’alors.
Exemple : L’un des plus riches, Boris Berezovski, dont la fortune est estimée à environ 2 milliards de $, réfugié à Londres, bénéficie du statut de "réfugié
politique" en tant qu’ "opposant politique"… Il vient publiquement d’annoncer qu’il finançait un renversement du gouvernement russe par la force ! (5) La Russie demande son extradition pour une multitude de détournements
de fonds, notamment au détriment de la compagnie aérienne Aeroflot. Bien sûr, Londres, qui n’hésite pas à envoyer ses ressortissants britanniques à Guantanamo, refuse cette extradition sous prétexte du respect des droits de l’homme….
Imaginons un gangster milliardaire proférant les mêmes menaces, à l’encontre de Blair ou de Bush, ou de tout autre chef d’Etat élu en toute légalité, alors qu’il
serait réfugié en Russie. Impensable ! Mais, le contraire pour les Prédateurs : oui.
3. Le déni d’un redressement économique
Délibérément, la Banque Mondiale et le FMI avaient imposé des privatisations accélérées en ignorant une règle de base : avant toute restructuration et privatisation, il est
indispensable de mettre en place des organes de contrôle et de régulation indépendants et incorruptibles. Poutine, malgré les difficultés dont l’assassinat de Kozlov donne une idée de
l’ampleur, y travaille sans relâche. La hausse des prix du pétrole et du gaz, jointe aux actions d’assainissement de Poutine ont permis à la Russie de rembourser, par anticipation, la totalité de
sa dette extérieure. Qui dit mieux ?
La Russie, sous son impulsion, a progressivement renégocié tous les contrats de cession, tant des droits d’exploration et des ventes de ses ressources, avec les multinationales. Dans un rapport d’égal à égal. Un des cas
emblématique est l’exploitation des gisements de Sakhaline, projet de plus de 22 milliards de $ que la Russie a renégocié tant avec les compagnies pétrolières, notamment la Shell, qu'avec le
consortium des banques internationales (200 banques). Tout cela a rendu fortement impopulaire Poutine au sein de la puissante "communauté financière internationale"…
La Russie a réussi, dans le même temps, à bloquer une des plus grandes catastrophes écologiques (6) qu’allaient accomplir ces compagnies pétrolières dans leur
exploitation de la presqu'île de Sakhaline. Détruisant une région entière, à l’exemple des ravages qu’elles ont provoqués au Nigeria.
Frankenstein, vous dis-je !
4. Le déni d’une Politique étrangère indépendante.
L’union Européenne n’a aucune politique étrangère, si ce n’est de suivre à la lettre les diktats et les aventures guerrières de l’extrême-droite américaine et
israélienne. Ce n’est pas le cas de la Russie qui pense qu’un monde unipolaire, dominé par une "hyper puissance" n’est pas l’avenir de
l’humanité. Une soi-disant fraction de l’humanité qui dirigerait, sous prétexte qu’elle serait supérieure aux autres, le reste du monde est un modèle qui n’est pas viable.
De plus, Poutine est contre l’attitude occidentale qui privilégie la menace et l’affrontement, au dialogue et à la coopération. D’où son rôle modérateur dans le traitement des problèmes complexes de la Palestine, du Moyen Orient en général ou de la gestion mondiale de
l’énergie. Philosophie politique incompatible avec celle des "néocons".
Dans une formidable action géopolitique, Poutine, s’est rapproché de la Chine, avec qui il a fondé le SCO (7). Lequel va, outre les Etats fondateurs, intégrer à terme :
l’Inde, le Pakistan, la Mongolie et… l’Iran ! Se profile, donc, en Asie Centrale, une superpuissance indépendante, capable de résister aux volontés hégémoniques des anciennes puissances
coloniales du Moyen Orient et de l’Asie. Et, surtout de résister aux incessantes manœuvres financières, capitalistiques, et militaires de l’Occident…
Frankenstein, vous dis-je !
5. Le déni d’une marche vers un Etat libre et démocratique.
Poutine, sait très bien que, pour le déstabiliser, les services spéciaux occidentaux sont prêts à faire assassiner leurs propres agents en Russie… Pour l’accuser, ensuite, d’assassiner ses opposants. Quand
on a 70% des russes qui sont pour vous, il est nul besoin de faire assassiner des opposants "médiatiques" (journalistes, et autres figures de composition...) qui émargent, la plupart, sur les livres de paye des services secrets occidentaux, via des associations "bidon". Il
connaît trop bien les combats de l’ombre...
La Tchétchénie, me direz-vous ? Il y travaille. Il a hérité de ce dossier, où la mafia s’est, là encore, longtemps et considérablement
enrichie (8), de concert avec les trafiquants d'armes et de pétrole occidentaux. Sachant, là aussi, que via la Georgie
frontalière, que les USA veulent faire rentrer à tout prix dans l’OTAN, c’est un flux incessant d’argent et d’armes dans les poches des chefs de guerre pour maintenir une guerre civile à ses
frontières. Les mêmes qui ont écrasé sous les bombes Palestine, Irak, Afghanistan ou Liban viennent, à présent, l’entraver dans la recherche de la paix en Tchétchénie. Il y arrivera. Le temps
joue en sa faveur…
Entre-temps, la liberté d’expression ne cesse de se développer. En 2000, en Russie, il y avait 20 000 journaux et publications. En 2007, il y en a 46 000. A cela s'ajoutent, 25 millions d’internautes qui peuvent accéder, sans censure, à toutes les informations disponibles sur
le net. A cela s’ajoutent encore, les 3 200 société de TV et radios, dont l’Etat ne contrôle que 10% (9). Alors,
qui dit mieux ?
Poutine : Frankenstein ?
C’est, tout simplement : un
Homme d’Etat. Un « Grand »…
Désolé pour les Prédateurs…
(1) Joseph Stiglitz (Prix Nobel d’Economie 2001). ‘Globalization and its discontents’, Chapter 5 : Who Lost Russia ?, Penguin Books, 2002.
(2) Joseph Stiglitz. Op. Cit.
(3) Les principaux supports de la propagande du Big Business débordent de ce type d’articles enflammés : The Economist (UK), The Financial Times (UK), The Wall Street Journal
(USA). On les retrouve en “copier-coller”, chez nos « journalistes-économistes » français…
(4) Macalister, T., Cobain, I., Tisdall, S., ‘Diplomatic rift as says : give us Berezovsky – Fresh Warrant issued and new inquiry into remarks about overthrow of Putin’, The
Guardian, Jeudi 19 Avril, 2007.
(5) Assassiné le 13 septembre 2006, avec son chauffeur. Il était, à sa mort, Vice Président de la Banque Centrale Fédérale Russe. Il avait 41 ans. Parlant couramment anglais et allemand. Il
était père de trois enfants.
(6) Voir, le formidable travail d’investigation des ONG sur Sakhaline, notamment le rapport :
Van Gelder, J.W. (2006), ‘Involvment of Credit Suisse in the Global Mining and Gas Sectors – A research paper prepared for Berne Declaration and Greenpeace Switzerland’, Profundo,
Hollande, Juin 2006.
(7) Le SCO (Shanghai Cooperation Organization) est une organisation intergouvernementale dont les langues de travail sont le chinois et le russe. Elle a été fondée, le 15 juin 2001, par la
Russie, la Chine, le Kazakhstan, le Kyrgystan, le Tajikistan et l’Ouzbekistan.
(8) Sous Eltsine et ses prédécesseurs, ce conflit était exclusivement géré, y compris sur le plan militaire et avec ses propres troupes, par le Ministère de l’Intérieur… Les enrichissements
personnels des gestionnaires de ce conflit, dans les détournements de fonds et les trafics d’armes et de pétrole des différentes mafias, étaient longtemps sans limite…
(9) Dimitry Peskov, The Guardian, Lundi 16 Avril 2007.
Crédit photos Poutine : Tickets of Russia. La
photo du milieu est celle d'Andrei Kozlov.