« … Une des préconditions du fascisme – une élite richissime, égoïste et myope, totalement indifférente aux décisions prises en son nom - se forme dangereusement … »
Harold Pinter (*)
C’était un voleur évadé, en fuite. Il a été tué par un policier. Une balle dans le dos, d’après les premiers éléments de l’enquête et des témoignages. La Justice vient de mettre en examen le policier pour « homicide volontaire ».
Défiant cette décision, dans une démonstration de « solidarité » avec leur collègue, des policiers ont bloqué avec des dizaines de véhicules de service, voitures et motos, la principale avenue de la capitale.
Autant pourrait-on accepter, comprendre, manifestations ou même grèves de policiers (à pied, comme toute mobilisation citoyenne...) pour défendre leurs droits légitimes à une amélioration des conditions de travail, de formation et d’entraînement (les procédures et méthodes d’arrestation en usage sont catastrophiques), de rémunération, de paiement des heures supplémentaires...
Autant la démonstration de force à laquelle ils viennent de se livrer, contre une décision de Justice concernant un des leurs, est inacceptable, extrêmement choquante et révoltante au regard de l’application de "La Loi" régissant une république et du fonctionnement démocratique de nos institutions.
Notre pays n’a pas à se transformer en ville d’un mythique Far-West où "les représentants de La Loi" tirent plus vite que leur ombre, dans l’impunité.
Encore plus atterrant est la réaction de notre caste politique qui, dans la lâcheté la plus totale, se montre incapable de rappeler le devoir d’exemplarité d’une police, disciplinée et irréprochable, au service de la protection des citoyens. Dans une démocratie, où rien ne justifie la mort d’un homme, d’une balle dans le dos. Fut-il un cambrioleur en cavale.
Nos cambrioleurs, "banksters", qui pillent la nation, eux ont droit à des bonus et parachutes dorés mirobolants...
Symptôme gravissime de la déliquescence et des valeurs de notre République, voilà ce que représente cette "manifestation" de policiers sur les
Champs-Elysées. La complicité de nos politiciens n’étant que l’aveu d’une "fascisation" progressive, voulue
ou acceptée de nos sociétés, pour reprendre l’image d’Harold Pinter.
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(*) Billington, Michael, The Life and Work of Harold Pinter, Faber & Faber, London, 1997, p. 331.