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Liberté ...

   
 

 

 

 


 
Le Québécois
chante la lutte des Peuples
contre la Prédation
 
 

Horizon...


Du conseil international en gestion stratégique et en développement d'économies émergentes...
Au regard sur la régression du respect de la dignité humaine, des libertés et du partage.
Une espérance solidaire avec ceux qui ne l'acceptent pas.
A contre-courant...

 

 

 

Modération


Tous commentaires et propos contribuant à enrichir échanges et débats, même contradictoires, sont amicalement reçus. Ne sont pas acceptées les pollutions organisées, en particulier :

a)  Hors sujets et trolls

b)  Attentatoires à la Dignité Humaine :

.  Injures

.  Propos racistes

.  Incitations à la haine religieuse

 

Avertissement

Liberté d’expression et abus de procédure

 

Devant la multiplication actuelle des atteintes à la liberté d’expression, sous forme d’intimidations et de menaces à l’égard de blogs et de sites, de la part d’officines spécialisées dans la désinformation et la propagande relatives aux évènements passés, présents et à venir au Moyen-Orient, tout particulièrement, il est rappelé que la Loi du 21 juin 2004 (LCEN),

modifiée par la Loi n°2009-1311 du 28 octobre – art.12, s’appliquant à des « abus » éventuels,

spécifie

dans son alinéa 4 :

« Le fait, pour toute personne, de présenter aux personnes mentionnées au 2

un contenu ou une activité

comme étant illicite

dans le but d'en obtenir le retrait ou d'en faire cesser la diffusion,

alors qu'elle sait cette information inexacte,

est puni

d'une peine d'un an d'emprisonnement

et

de 15 000 Euros d'amende»

 

 

15 août 2009 6 15 /08 /août /2009 21:00

 

 

« Pauvre troupe, dont les malheurs injustes demeurent comme une ineffaçable leçon dédiée à ceux qui gouvernent et à ceux qui commandent. »

 

Général de Gaulle  (1)

 

 

 

 

 

 

 

Je m’attendais au pire…

 

Ce fut pire !…

 

Cette formule, sans paternité précise, résume mon sentiment aux propos de notre sympathique président (2), « chef des armées », devant micros et caméras au pied de la tribune officielle du 14 juillet, dès la fin du défilé.

 

L’engagement des troupes françaises en Afghanistan, nous a-t-il expliqué, a pour finalité la "défense de la démocratie", de la femme afghane et « des petites filles afghanes à qui on coupe les mains pour avoir mis du vernis à ongles… ».

 

 

Liberté de la malnutrition et du massacre

 

Eh, oui ! Les pauvres petites filles afghanes qui envient le vernis à ongles de leurs mères et de leurs grandes sœurs, à la sortie de la manucure chez leurs coiffeuses, tous les jeudis soirs. Parce que chez ces attardés, ils ne peuvent pas faire comme tout le monde, le dimanche : c’est le vendredi…

 

Petites filles, rêvant à la lecture des magazines spécialisés dans « la libération de la femme » … Marie-Claire, Elle, Cosmopolitan, sur les tables basses du salon devant les écrans TV, multipliant la vision de toutes ces belles jeunes « femmes libérées », dans les publicités des fabricants de cosmétiques ou les feuilletons… FriendsPlus belle La Vie… Dans le ronronnement des climatiseurs, en été. En hiver, dans le canapé noyé de coussins, face au feu de cheminée…

 

On se doit de les comprendre, à leur âge, elles n’ont qu’une envie. Se précipiter au supermarché du coin pour s’acheter le symbole de la liberté et de la civilisation : le vernis à ongles

 

Problème : les méchants Talibans, enturbannés de machisme, qui les attendent sournoisement au coin du parking pour leur couper les mains… Tchac ! D’un seul coup ! Sans anesthésie, en plus !… Avec leurs grands sabres, recourbés par la fourberie de leur sauvagerie ancestrale.

 

Affection, tendresse, sentiment paternels : connaissent pas. Même pas des animaux… Racisme ?… Mais, non, c’est scientifique, je l’ai lu dans les journaux et je l’ai vu à la TV : résultat des enquêtes journalistiques, diffusées uniquement sous forme de clichés et de stéréotypes par nos grands médias…

 

Comment être insensible à la souffrance du manque de vernis à ongles des petites filles afghanes ?… Tant de cruauté de ces terroristes… Pardon : « insurgés », est la nouvelle appellation. Je m’y perds. Elles qui n’ont rien pour se soigner, rien à manger (3). Leurs maisons bombardées, saccagées, les récoltes familiales détruites par les armées d’occupation.

 

Pourquoi ne leur laissent-ils pas, au moins, le vernis à ongles ?… Ne pas comprendre combien elles en ont tant besoin pour oublier cette apocalypse quotidienne infligée par la soldatesque OTANesque.

 

Si au moins, ils faisaient semblant comme pour l’organisation des élections par l’OTAN. Truquées, évidemment, jusqu’à trois chiffres après la virgule. Mais, on fait comme si… Alors que les Talibans, eux, ne simulent pas. Tchac !… Faire semblant, c’est trop sophistiqué pour ces primitifs.

 

Regardez la différence avec les glorieux soldats occidentaux défenseurs de la Civilisation, dans leurs costumes d’extra-terrestres, devant les TV du monde entier, faire semblant de « créer des écoles ». Gagner « les cœurs et les esprits » : « hearts and minds »… Chevaliers sans peur et sans reproche…

 

C’est une des marottes des spécialistes de la « guerre psychologique » : « ouvrir des écoles ». En fait et en priorité, de la « guerre psychologique » contre les opinons publiques des pays occidentaux qui n’acceptent pas les délires coloniaux.

 

Ils pondent à répétition des remakes des grands classiques des films de propagande des guerres coloniales des années 60–70 : les portugais en Angola ou au Mozambique, les britanniques au Kenya et ailleurs, les hollandais en Indonésie, les français en Algérie, les américains au Vietnam.

 

Dans ces films, on ne massacrait pas, on ne brûlait pas des villages, on ne torturait pas les résistants, on passait son temps à « ouvrir des écoles ».

 

La trouvaille n’est pas mal. Inusable, on n’arrête pas de s’en servir. Mais, je la trouve un peu intello, avec un risque de saturation à force de répétition. Il faut, de temps en temps, une formule choc : « couper les mains des petites filles pour cause de vernis à ongles »… Là, nous atteignons un palier supérieur : « Le choc des images, le poids des mots », comme dit l’autre...

 

Aghhh !…  Même si cela n’a jamais existé, ne s’est jamais produit, rien que d’y penser j’en ai la rage !…

 

Salauds de Talibans, il faut les nucléariser ! Les "droner" n’est pas suffisant. Comprennent pas. Noyer ces barbares dans le feu de l’enfer, eux, leurs ascendants, descendants et collatéraux. Jusqu’à la cinquième génération.

 

Cinq générations, déjà, qu’ils en bavent dans les invasions successives : britanniques, soviétiques, occidentales. Et, ils n’ont pas encore compris l’importance du vernis à ongles… Il leur faut cinq autres générations, pour parvenir au seuil de l’intelligence.

 

Les atomiser jusqu’au dernier, c’est tout ce qu’ils méritent. Des têtes de mules…

 

 

La loi du genre

 

Certains trouvent pathétique de voir notre « chef des armées » justifier l’envoi de nos soldats en Afghanistan sur un tel mensonge. Ils exagèrent. Ils manquent de réalisme, des romantiques égarés en politique.

 

D’autres protestent : les petites afghanes ne portent pas du vernis à ongles, mais les « stigmates de la guerre ». Quand elles survivent, avec leurs petits frères….

 

Beaucoup meurent dans les bombardements ou les tirs aveugles des troupes de l’OTAN. Périodiquement, des fillettes sont tuées par les soldats de cette coalition (4). Nombreuses sont celles qui resteront estropiées, infirmes ou aveugles.

 

Voilà ce qu’affirment des spécialistes de la santé de l’enfant. Des âmes sensibles…  Parce que même les bureaucrates de l’ONU, des multiples ONG prospérant dans le Charity Business, n’en font jamais état.

 

Voyez l’UNICEF, l’organisation de l’ONU chargée de la protection de l’enfance : vous ne trouverez aucune publication d’étude, de statistique, d’enquête, de recensement, sur les ravages des bombardements, des blessures et infirmités de guerre concernant les enfants, conséquences des opérations militaires et des bombardements des troupes occidentales. Encore moins, un inventaire précis du nombre d’orphelins dus à ces actes. (5)

 

En Afghanistan, comme en Irak. Malgré son budget en millions de dollars…

 

Ne rien voir, ne rien entendre, ne rien savoir…

 

Je comprends l’UNICEF, et les « grandes » ONG, cela mettrait en difficulté leur star system. Angelina et autres People risqueraient d’en défaillir et de ne plus venir se balader en Afghanistan, devant les caméras. Il faut bien collecter des fonds. Money, money, money

 

On ne tartinera donc que sur la malnutrition ou les écoles… Enfants tués, blessés, orphelins suite à des actes de guerre ?… Par des occidentaux ?… My God !… Hors de ma vue !…

 

Normal. Les guerres coloniales sont fondées sur le mensonge. L’omission. La dissimulation. C’est la loi du genre. Considérer les peuples occidentaux, le peuple français, comme des veaux pouvant ingurgiter n’importe quelle « hormone de croyance », enrobée d’OGM médiatique (Obsession Grossièrement Manipulée).

 

Comme en Irak. Aucune des infrastructures civiles protégées par les Conventions de Genève comme les stations d’épuration d’eau, écoles, universités, hôpitaux, ministères (à part celui du pétrole), musées, administrations, n’a été épargnée de la destruction. Comment le faire admettre ?… A cela s’ajoutant 2 millions de morts, un pays entièrement détruit, sans mentir à fond ?…

 

Mentir à fond… Quoique…

 

Croire que plus l’argument est stupide et plus ça passe auprès de l’opinion publique, peut se révéler une erreur. Une fois encaissé l’effet choc émotionnel, une argumentation futile, dérisoire et grotesque peut aller à l’encontre de l’objectif souhaité. L’esprit critique insuffisamment anesthésié peut réagir à contretemps.

 

J’en conviens, on peut s’étonner devant l’image projetée « des mains de petite fille coupées pour délit de vernis à ongles ». Même ma grand-mère a pouffé de rire sous son chapeau de paille : « Qui peut avaler pareille tourte ?…», s’est-elle exclamée quand elle a entendu ça…

 

Pour elle, « tourte » est très péjoratif. Madrée, intuitive comme pas deux, elle déteste les tourtes. Jugement sans appel, ce sont les « cache-restes » des restaurants à touristes : tirer un coup de fusil avec des restes et des invendus comme cartouches…

 

Tout en essayant de la convaincre, elle m’a fait réfléchir…

 

J’ai dû, patiemment, lui expliquer qu’il ne faut pas en vouloir à un chef d'Etat qui fait son boulot. Surtout, quand il le fait bien. Celui de justifier l’injustifiable. Promouvoir l’inacceptable. Avec la conviction de la bonne conscience balayant toutes les hésitations. Ça c’est du talent ! Mais, aux claqueurs de talons qui l’entourent, incapables de formuler une propagande qui tienne la route.

 

Au fond, c’est vrai… Régresser jusqu’au « vernis à ongles », ne serait-il pas la démonstration du manque de créativité des experts en désinformation ?… N’est-on pas allé un peu trop loin dans la fantasmagorie de la caricature ?…

 

Moi, ce qui me gêne ce n’est pas le mensonge, dans une propagande. C’est la faiblesse du mensonge. Sa mauvaise articulation. Le niveau d’argumentation est en train de baisser. Admettons-le…

 

Des nuls…

 

Un moment, ils affirmaient que les Talibans jetaient de l’acide sur les visages des petites filles qui allaient à l’école. Impossible de trouver de l’acide en Afghanistan ! Le droguiste du coin n’a pas ça. Sauf dans les labos de transformation de l’opium, étroitement contrôlés par les armées d’occupation. Livré par avion. Pas sérieux, comme baratin, l’acide. Alors, ils ont changé de chanson…

 

Je le reconnais. Dans le temps, la propagande coloniale avait du souffle. Du panache. On partait massacrer, violer, piller, spolier, annexer, pour « évangéliser » les sous-hommes. Du style, de la grandeur !…

 

Plus tard, ce fut pour « apporter la civilisation » à des cannibales, des moyenâgeux, endormis dans leur passivité. Les « instruire », les « initier à la modernité ». Récemment, on s’est précipité pour démolir méthodiquement l’Irak au nom de la liberté, de la démocratie, des droits de l'homme. Argumentaire qui avait un minimum de tenue…

 

Mais, crever des gens et se faire trouer la peau pour du « vernis à ongles »…

 

L’idée est choquante à souhait, la preuve : j’ai failli perdre ma sérénité bouddhique. Mais, c’est un peu gros. Ou, léger en crédibilité. A ce rythme là, on ira se battre en Afghanistan, bombarder et mitrailler les villages, pour imposer des distributeurs automatiques dans les écoles primaires afghanes. Pour « libérer les petites filles ».

 

Non pas pour distribuer des brioches ou des barres chocolatées, elles ne pourraient pas payer, mais pour installer des distributeurs automatiques de préservatifs gratuits. Puisque les « zélateurs de la liberté », il y a même un rigolo de la TV française qui fait sa pub personnelle là-dessus, nous disent que notre propre jeunesse doit y avoir accès dès son plus jeune âge, dans les établissements du primaire. Copuler et consommer, tels des lapins en cage : voilà l’horizon radieux de « la modernité », le sens, la finalité de la Destinée Humaine.

 

Après le vernis à ongles, le préservatif dans les cours de récréation du primaire…

 

Ma grand-mère a raison.

 

Trop facile tout ça. Vraiment, notre propagande doit se recycler. Il y a du laisser-aller. Aucune créativité. Nous ne sommes pas dans une émission de télé-réalité. C’est du sérieux. Notre « chef des armées » doit reprendre en main les "services d'action psychologique". Un effort d’imagination, d’originalité, que Diable !… Mettre tout le monde au travail, virer les incapables et renouveler son staff…

 

D’autant que les choses sont en train de tourner au vinaigre, en Afghanistan…

 

 

 

Petite fille afghane blessée.
Non, elle ne demande pas du vernis à ongles.
Elle réclame ses parents tués avec le reste de sa famille, dans leur maison écrasée sous les bombes de l’OTAN.

 

 

Putain de guerre

 

On vient de rapatrier le corps d’un de nos soldats tué, avec deux de ses camarades gravement blessés…

 

J’éprouve compassion à leur « malheur injuste », pour reprendre la citation du général de Gaulle. Leur jeunesse fracassée, physiquement, moralement.

 

Dans une guerre coloniale dont la cruauté, la stupidité, n’ont d’égales que celles des irresponsables qui « gouvernent » et qui « commandent » pareilles aventures, sur fond de crimes contre l’humanité.

 

Je leur dédie un extrait du livre, Putain de Guerre (6), écrit pas un marine américain Joshua Key. Réfugié au Canada, avec sa femme et ses enfants, il a refusé de retourner en Irak.

 

Il témoigne de ce qu’il a vu, ce à quoi il a participé en Irak, ce qu’il a été obligé de pratiquer, contre sa conscience. Il restitue ce qui est méticuleusement censuré tous les jours, en Occident, dans les médias, les moteurs de recherche, occulté par le matraquage de la propagande : photos, cris, informations, récits de l’horreur.

 

L’horreur coloniale, qui se perpétue en Afghanistan :

 

« … J’avais participé à près de deux cents perquisitions, mais je n’y croyais plus depuis longtemps. La plupart de mes camarade ressentaient la même chose.

Ces raids n’étaient qu’un prétexte pour insulter, intimider et appréhender les Irakiens.

 

Ils nous offraient une cible pratique, un moyen de relâcher nos frustrations, puisque nous n’avions pas de vrais ennemis à combattre. Pendant un certain temps, ces descentes nous ont permis de frapper des civils, de voler leurs biens et de détruire tout ce qu’on ne pouvait pas embarquer.

 

Je ne suis pas le seul à avoir renoncé aux passages à tabac et au pillage, tandis que ma conscience se réveillait. Pour nombre d’entre nous, poser des pains de C-4 (7), saccager des maisons, menotter des adolescents et des hommes nous a stimulés, voire excités, pendant un mois ou deux, mais pas davantage.

 

Le temps s'étirait et nous n’avons pas trouvé d’armes de destruction massive. Nous n’avons pas trouvé de signes d’activité terroriste. Nous n’avons découvert que des civils dont nous avons ruiné la vie ou que nous avons tués, simplement parce qu’ils avaient croisé notre chemin.

 

Certains d’entre nous ne les ont même pas respecté dans la mort… »

 

 

La guerre coloniale, c’est ça.

 

L’occupation occidentale en Afghanistan, c’est ça.

 

Ce n’est pas la distribution gratuite de vernis à ongles aux petites filles Afghanes.

 

Une bouillie, que le cynisme et le sadisme du plus pervers des serial killers aurait du mal à porter au point d’ébullition atteint à présent : sauvagerie, souffrance, avilissement, terreur.

 

Dans le Chaudron du Malheur, où nous immergeons…

 

… Le Peuple Afghan.

 

 

 

 

 

 

(1)  A propos du désastre militaire de 1870 provoqué par la stupide incurie de Napoléon III, son gouvernement et son état-major, face à l’Allemagne de Bismarck.

(2)  Un récent sondage fait état de 63 % de français trouvant Sarkozy « sympathique » …

(3)  « … L'Afghanistan occupe la quatrième place dans le monde en termes de malnutrition. Un enfant afghan sur 10 est sévèrement mal nourri, plus de la moitié des enfants souffrent d'un retard de croissance et un enfant sur quatre meurt avant l'âge de 5 ans. La diarrhée et les infections aiguës des voies respiratoires - des états encore aggravés par la malnutrition - représentent environ 41 % de la totalité des décès infantiles et un enfant afghan sur trois souffre de carence en iode… 
La mortalité maternelle représente une large proportion des décès en Afghanistan… », UNICEF, Août 2009, http://www.unicef.org/french/emerg/afghanistan/index_action.html

(4)  Des soldats canadiens tuent une fillette, Le Devoir Montréal, 29 juillet 2009.

(5)  La dernière « vague » étude du genre, en Afghanistan, remonte à 1997 (il y a 12 ans !…) : http://www.unicef.org/french/emerg/afghanistan/index_9028.html

(6)  Joshua Key, Putain de Guerre, Albin Michel, 2007, pp. 208-209.

(7)  Puissant explosif, présentant l’avantage d’être malléable comme de la pâte à modeler avant sa mise à feu au moyen d’un détonateur.

 

Photo : The Cleveland

 

 

 

 

 

 

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25 mai 2009 1 25 /05 /mai /2009 00:35

 

 

N.B. Le texte étant tronqué par le serveur, il a été scindé en  deux.

Suite de la première partie :

Tahar Ben Jelloun et les Talibans : Tartarin et les Lions… (1)

 => Tartines de Tartarinades

 => Emballage au ruban de soie

 

 

 

Hamburger au hachis de porc

 

 

La cohorte des chasseurs d’islamistes et de Talibans ne cesse de s’étoffer, en France. Parmi les plus pétulants figurent des représentants de la sphère arabo-musulmane, dans sa spécificité franco-maghrébine.

 

Prenons l’exemple de l’écrivain Tahar Ben Jelloun, qui déploie une activité fébrile sur ce terrain, depuis quelques temps. Son argumentation, son niveau d’analyse, la fiabilité de sa documentation ou de ses sources, méritent l’intérêt.

 

Se proclamant Musulman, ses positions ont de l’écho auprès de ceux qui connaissent mal et l’Islam et les pays musulmans. Son influence dans les médias, notamment auprès des journaux dits “de gauche”, n’est pas négligeable. C’est devenu un notable du monde des Lettres.

 

J’admire Tahar Ben Jelloun dans son art de “la chasse aux barbus”. Il arrive, grâce à ses dons de pisteur Apache, jusqu’à débusquer des “islamistes” derrière des porcs !... Difficile de faire mieux. Oui, il s’indigne de l’abattage des porcs ordonné par le gouvernement égyptien dans le cadre de la lutte contre la grippe porcine.

 

Ses cris d’indignation sont d’autant plus impressionnants qu’il s’était révélé d’une remarquable discrétion pendant le massacre des Palestiniens de Gaza, fin décembre et courant janvier 2009 (8). Plus muet qu’une carpe…

 

Il est vrai que ses couinement déchirants, dans la défense des porcs, ont pour finalité sa solidarité avec les Coptes visés dans cette mesure prophylactique, nous explique-t-il, par les Frères Musulmans. (9)

 

Seul problème…

 

François Burgat, le meilleur spécialiste français et européen de la question (de très loin !...), le rappelle : le Mouvement des Frères Musulmans a été créé par des membres de la bourgeoisie égyptienne : commerçants, médecins, architectes, ingénieurs, enseignants, fonctionnaires, artisans. Beaucoup de femmes, aussi, instruites et occupant des postes de responsabilité, notamment dans la santé publique, la justice et l’enseignement.

 

Créé conjointement, par des Musulmans et des Coptes. (10)

 

Pour lutter contre le féroce colonialisme britannique qui rançonnait l’Egypte, dissimulé derrière le rideau de la royauté de pacotille du roi et de son entourage, débauchés et corrompus, Farouk 1er.

 

Et, tenter de subvenir aux besoins de la population oubliée, des plus démunis (au Caire, il n’y avait pas que Soeur Emmanuelle…), par des créations de dispensaires, écoles, orphelinats. Ils en ont fondé, financé, des centaines. Sur leurs propres derniers.

 

Musulmans et Coptes : à la fois “résistants” au pillage colonial exercé via une nomenklatura corrompue, et “militants” pour une société démocratique fondée sur la justice sociale et économique. Beaucoup sont morts sous la torture, dans des exécutions sommaires, ont croupi de longues années dans d’atroces conditions de détention.

 

D’abord sous les coups des tortionnaires britanniques. Puis, sous ceux des nassériens, bien qu’ils se soient alliés à eux pour renverser le régime colonial. Les généraux putschistes n’admettaient pas le refus de la dictature militaire par les Frères Musulmans. Malgré l’évidence : s’ils avaient participé au renversement d’une monarchie corrompue, ce n’était certainement pas pour accepter qu’une dictature militaire succède à un régime policier…

 

Bien sûr, depuis s’est constituée une branche “radicale”, histrionique, guignol médiatique, largement infiltrée et instrumentalisée par les services spéciaux égyptiens et occidentaux. Spécialisée dans les déclarations obscurantistes, sous couverture “fondamentaliste”, l’organisation d’attentats et la création de tensions artificielles avec la communauté Copte.

 

Intense travail de désinformation pour justifier, auprès de l’opinion internationale, le soutien occidental à la dictature militaire du général Moubarak. Diviser pour régner. Neutraliser la seule opposition organisée et puissante. Supprimer, entraver toute liberté d’expression. Avec pour finalité de caricaturer, diaboliser, l’image du Mouvement des Frères Musulmans. En Egypte et ailleurs.

 

La partie la plus éduquée de l’Egypte ployant sous la dictature du général Moubarak et ses persécutions, similaires à celles du roi Farouk, membre, sympathisante du Mouvement des Frères Musulmans, sait très bien que les attentats, aussi tragiques que stupides, avec leur mise en scène impeccablement formatée, sont contraires à ses intérêts économiques et politiques. Ils n’ont pour but que de déconsidérer toute opposition à un régime détesté pour sa corruption, et son déni des libertés au nom de la lutte contre le terrorisme. L’action violente ne fait pas partie de son credo.

 

En Egypte, hors la caste dirigeante, les cadres comme l’ensemble de la population du pays, qu’ils soient Musulmans ou Coptes, formulent exactement les mêmes souhaits. Musulmans et Coptes sont avant tout Egyptiens, fervents défenseurs de leur identité nationale. Souhaitant vivre dans un pays libre, dans la justice et la solidarité, et non pas dans une colonie américano-israélienne encadrée par une nomenklatura imposant une dictature militaire.

 

Défendre les porcs pour sauver les Coptes… Pourquoi nous présenter un tel un hachis de désinformation, aussi grossier ?...

 

Ce n’est pas par malhonnêteté intellectuelle que Tahar Ben Jelloun nous sert ce coulis de clichés. Non. Probablement, ne connaissant pas l’Egypte, encore moins le Mouvement des Frères Musulmans dans ses différentes composantes, y compris celle créée en trompe-l’œil par l’appareil répressif de la dictature militaire, s’est-il laissé emporter par son émotion. Voler au secours des Coptes !...

 

Confondant, ainsi, “marketing éditorial” avec recherche historique et sociologique. Mais, ce n’est pas voulu.

 

L’émotion, que voulez-vous…

 

 

 

Sauce “blue cheese”

 

 

Agghhh, l’émotion !...

 

On retrouve ce même emportement fatal, quant à l’exactitude des faits, la fiabilité des informations, dès que Tahar Ben Jelloun armé de son escopette et de son tromblon part, en valeureux Tartarin, chasser le Taliban. Sautant de l’Egypte en Afghanistan. Ou vice-versa. Selon la direction du vent médiatique.

 

Il s’emporte dans un article (11), suffocant de rage, sur l’obsession possessive des Talibans pour le sexe féminin. A le lire, sous son cri d’indignation, l’émotion nous étreint tout autant :

“… Les talibans, par exemple, imaginent un monde où la femme s'est retirée du monde. Elle existe, mais cloîtrée dans la maison et n'ayant aucun droit de sortir. Cela ne veut pas dire qu'ils crachent sur le plaisir sexuel, au contraire, ils aiment ça au point de vouloir le posséder et d'être les seuls à en jouir”.

 

Waouh !... Face à ces mâchoires de carnassiers baveux, il ne reste plus qu’à déclarer les Talibans anthropophages !... Prochain épisode, certainement…

 

Une pincée d’analyse politique, pour conforter le propos dans le sérieux :

“… C'est le sens du projet de loi que le président Hamid Karzaï a voulu déposer. Un projet qui souhaitait rendre légal "le viol de l'épouse" et interdire à celle-ci de sortir sans l'autorisation du mari.

“… Cette loi aurait visé les femmes chiites (10 % de la population).

“… Hamid Karzaï comptait sur ce projet de loi pour s'attirer la sympathie et les votes des chiites lors des prochaines élections”.

 

Une pointe de doute, toutefois, devant l’extrême excitation de ses transes. Notre Tartarin maîtriserait-il son sujet ou exorciserait-il ses propres obsessions ?...

“… Une femme qui jouit est une "salope" ; elle est considérée comme une prostituée (sauf que les malheureuses travailleuses du sexe ne jouissent pas, ce n'est pas un plaisir, c'est un travail, une corvée pour gagner leur vie). Il serait intéressant de faire lire aux hommes ayant peur de cette jouissance quelques-uns des témoignages de femmes qui racontent leur vie sexuelle”.

 

D’autant plus que sa conclusion est plus que bâclée, comme si l’auteur, épuisé par ses propres incantations, avait perdu le fil de sa crise d’hystérie :

“… Cette image résume la situation : la guerre en Afghanistan tourne autour du l'opium et de la femme. Il faut contrôler les deux, sinon, c'est la fin de la tragédie entamée par la barbarie au nom d'un islam totalement étranger à ces pratiques”.

 

Ainsi, faut-il "contrôler l’opium et la femme" pour en terminer avec la catastrophique situation afghane… Nous déclare Tartarin dans sa fulgurante vision géopolitique !

 

Sous la sauce “blue cheese” que nous déverse Tahar Ben Jelloun, cette fantasmagorique obsession sexuelle telle que l’Occident la projette sur les autres en l’occultant chez lui, que trouve-t-on ?...

 

Tout simplement, trois vecteurs de la propagande du lobby militaire occidental justifiant sa colonisation de l’Afghanistan et sa stratégie anti-iranienne, aisément repérables :

 

 

i)  Le mythe de l’instauration de la démocratie par l’Occident

 

Tout cela à partir d’un projet de texte de loi, destiné à satisfaire des tribus chiites, nous assure-t-on. Façon de nous dire : vous voyez, grâce à l’instauration de la démocratie que nous avons réussi à imposer, chez ces sauvages, ce texte a pu être bloqué. Heureusement que nous sommes présents sur place !

 

Tous les observateurs attentifs au contexte afghan avaient compris qu’il s’agissait d’un “hoax”, un coup monté par les “services d’action psychologique”, les “PsyOps”, relayé au quart de tour, dans une parfaite coordination, par tous les médias occidentaux. Et, leurs relais sponsorisés : les “leaders d’opinion”.

 

Les évidences crevant les yeux :

=> Il n’y a pas plus de “parlement” en Afghanistan qu’il n’y en avait sous l’occupation par les nazis ou les staliniens en Europe, au sens d’élections libres, selon des programmes de gouvernement librement débattus dans la diversité des opinions.

=> Les pseudo “parlementaires” ne sont que des chefs de guerre ou de gang, parmi les pires “collabos” ultracorrompus et complaisants, que les forces d’occupation ont pu ramasser dans les différentes provinces.

=> Les “textes de loi” qui leur sont soumis sont, uniquement, ceux concoctés par les forces d’occupation. Celui sur le “viol des femmes dans l’espace conjugal”, véritable provocation ne correspondant à aucune nécessité, n’avait pour but que de déclencher une campagne de propagande à l’intention des opinions publiques en Europe, et en Occident de façon globale, afin de renverser leur opposition à l’aventurisme de leurs gouvernements en Afghanistan.

 

L’irréalisme de ce texte, son niveau d’absurdité, d’imbécillité (appliquer une loi dans une chambre à coucher…), sous le prétexte de réunir 10% de voix chiites au bénéfice de Karzaï (contesté actuellement par les militaires américains du fait de ses condamnations répétées des bombardements aveugles...), démontrent que la propagande, confiante dans l’énormité de ses moyens, n’hésite pas à solliciter cyniquement les niveaux de crédulité les plus primaires, et les plus pervers…

 

 

ii)  La diabolisation du Chiisme

 

La population chiite en Afghanistan ne représenterait que 10% des musulmans. C’est le deuxième palier de la manœuvre : la diffamation incessante du Chiisme. En fait, c’est l’Iran, où se trouve la majorité des musulmans chiites, qui est visé.

 

Nous avons tous subi cette propagande incessante, très souvent sans nous en rendre compte, sur la diabolisation du Chiisme. En Irak a été entretenu artificiellement une guerre de religion à grand renfort d’opérations commandos, faisant sauter mosquées, lieux de pèlerinage, alternativement Chiites et Sunnites. Ou encore, luttes armées entre “milices” armées chiites et sunnites.

 

Alors que pendant la longue guerre contre l’Iran, qui a duré 8 ans, les Irakiens sunnites et chiites combattaient côte à côte… Tout le monde sait au Moyen-Orient, que ce sont les occidentaux qui sont derrière ces manœuvres de division et de propagande.

 

Qui n’a pas subi ces discours fumeux, répandus par les “experts” patentés dans nos médias, sur le spectre de “l’Arc Chiite” qui menacerait le monde musulman sunnite, et de là l’Occident ?... Par ses fusées et sa prétendue fureur nihiliste.

 

Dans la propagande, le Chiisme se résumerait à une secte de sauvages, acharnés à la destruction des “valeurs de l’Occident”. Pire, une horde de primitifs, pervers frustrés, assoiffés de sexe, acharnés dans la violence faite aux femmes.

 

Le Chiisme n’a rien à voir avec les descriptions sordides, dégradantes, que peuvent en laisser croire une poignée de radicaux ou de charlatans, bien souvent instrumentalisés, comme toute religion en période de crise, de tension et de guerre. Et, bien sûr, diabolisé par une propagande hostile aux pays où il est majoritaire, pour des raisons coloniales ou idéologiques.

 

Cette branche minoritaire de l’Islam, comme le protestantisme dans la chrétienté, représente par son apport dans les domaines de la philosophie, de la spiritualité et de la mystique un immense patrimoine universel.

 

Ceux qui en ont approché l’étude parlent d’un véritable “continent” de la connaissance humaine, pratiquement ignoré en Occident. En tout cas, systématiquement occulté par l’appareil de désinformation. Patrimoine que nous devons reconnaître avec respect comme un bien commun, un héritage incomparable de la pensée collective (12).

 

Henry Corbin, par exemple, éminente figure du protestantisme français, d’une exceptionnelle élévation morale, spécialiste de Karl Barth, Heidegger, Ibn’Arabi, a passé une grande partie de sa vie à étudier le Chiisme en Iran, la gnose Chiite.

 

Il en a rédigé, entre autres ouvrages sur le sujet, une somme impressionnante : En Islam Iranien : aspects spirituels et philosophiques (13). Quatre volumes, que je vous invite à feuilleter pour sortir des âneries véhiculées sur le Chiisme, par les bonimenteurs pullulant sous forme “d’experts”, “islamologues”, ou  “psychanalystes de l’Islam” dans la sphère médiatique. 

 

Il est certain que dans des pays apaisés et prospères, lorsqu’ils ne seront plus en état de siège, le Chiisme trouvera sa juste place de religion dans une société civile, à l’exemple des autres religions et croyances dans le monde.

 

 

 

iii)  L’islamophobie sexuée

 

Instrumentaliser le sexe de la femme musulmane, pour exciter le mépris à l’égard d’un peuple. Thème devenu traditionnel dans la propagande occidentale. Représentation du racisme dans toute sa perversité, dans son fanatisme absolu, via l’instrumentalisation du sexe de “l’Autre”, celui que l’on veut opprimer. Expression de la psychose actuelle et structurelle de l’Occident.

 

Racisme sexuel, d’abord, à l’encontre de la femme musulmane, afghane dans le cas présent. L’argumentaire restant le même.

 

Femme totalement infantilisée, déclarée, réputée, définie, sans personnalité, sans caractère. Incapable de se faire respecter à l’intérieur de son couple, de “gérer” sa relation sexuelle, sans le secours et la tutelle de l’Occident, via son “Business Féministenoyauté par les services spécialisés dans la désinformation (associations de “défense” de la femme, presse féminine et autres médias…).

 

Femme, bien sûr, encore moins en mesure de partager respect, tendresse, complicité, affection, amour, passion, avec son homme. Dans l’imaginaire, l’imagerie de la propagande, ces sentiments sont inaccessibles aux peuples et nations n’ayant pas encore été “civilisés” par l’Occident. Dans le fantasme raciste, les musulmanes, les afghanes, et leurs hommes, sont considérés encore au stade animal, inaptes à l’Amour.

 

En Afghanistan !... Dans un pays qui regorge des plus beaux poèmes, chansons, légendes d’amour de l’histoire de l’humanité… Avec des figures de femmes magnifiques de beauté et d’héroïsme comme la célèbre Malalaï de Maïwand, que j’ai eu l’occasion d’évoquer.

 

Racisme sexuel, ensuite, à l’encontre de l’homme musulman. Trouver les images les plus choquantes provoquant horreur et haine, dans l’opinion publique, pour des hommes que notre soldatesque se doit de massacrer sans états d’âme. Pour avilir le courage exceptionnel de “résistants” capables malgré des moyens dérisoires de s’opposer, avec succès, aux armées les mieux équipées et entraînées du monde.

 

La propagande actualise, ainsi, un argumentaire digne du temps des croisades et des premières aventures coloniales. Seule différence avec les siècles précédents, évolution des mœurs oblige, les références sexuelles y sont, à présent, dominantes.

 

Justifiant, ainsi, l’asservissement d’un peuple, pour l’éduquer, lui apprendre la civilisation. Le bon usage du sexe. Classique. Rallier l’opinion au mythe du sous-homme ne méritant que la violence et l’esclavage. A la Daniel Pipes, un des gourous islamophobes des gouvernements US toujours très actifs : “Les Palestiniens sont misérables et ils méritent de l’être”. (14)

 

 

 

Trous de gruyère ou de mémoire

 

Dans sa diatribe, en donneur de leçons, Tahar Ben Jelloun pointant du doigt la sauvagerie des mâles afghans, évoque la possession sexuelle, la prostitution, la confiscation du sexe de la femme à l’usage exclusif d’une obsession.

 

Pour compléter sa leçon de morale, il aurait pu prendre pour exemple les algériennes violées par des militaires français pendant la colonisation de l’Algérie, contraintes à la prostitution, enrôlées de force dans les Bordels Militaires de Campagne, les fameux BMC.

 

Certaines de ces prostituées algériennes avaient même été affectées en Indochine, à Dien Bien Phu, à 10.000 km de leur pays, pour satisfaire les besoins sexuels du corps expéditionnaire français. Dans le camp retranché, lors de sa reddition, les troupes de la résistance vietnamienne du général Giap, ébahies, ont trouvé deux BMC avec 18 filles, algériennes et vietnamiennes…

 

Pour illustrer son prêche, Tahar Ben Jelloun aurait pu parler du célèbre tortionnaire israélien portant le surnom de Kojak. Spécialisé avec son équipe dans les viols et sévices sexuels à l’encontre des femmes Palestiniennes. Les forçant dans des mises en scène pornographiques, les prenant en photo lors des séances de viols collectifs.

 

Menaçant, dans un chantage implacable, de les montrer à leurs parents, leurs frères et sœurs, leurs fiancés ou maris, leurs enfants, si elles ne collaboraient pas avec les services secrets d’occupation. Pendant des années. Pour certaines, ces tortures sexuelles ont duré 9 ans…

 

Pour émouvoir ses paroissiens, Tahar Ben Jelloun aurait pu égrener quelques uns des multiples forfaits sexuels commis par les troupes d’occupation occidentales en Irak. En général, ils sont systématiquement étouffés. De temps en temps, il arrive qu’on en coince un. Alors, on fait un exemple. Uniquement lorsqu’il y a crime de sang.

 

Comme la semaine dernière, en ce 21 mai 2009, où ont été condamnés aux USA, Steve Dale Green, 24 ans, et quatre de ses collègues. Ils ont violé une jeune irakienne de 14 ans, Abeer Qassim Hamza Al-Janabi, alors qu’ils servaient en Irak en tant que soldats, chargés d’apporter civilisation, liberté et démocratie…

 

Ils l’avaient repérée lors de leurs patrouilles. Elle leur plaisait. Ils ont organisé une descente chez elle et l’ont violée, collectivement, devant sa famille. Puis, ils l’ont jetée comme un kleenex. Mais, ils ont un peu dépassé les bornes…

 

En fait, ils l’ont tuée, après usage, avec son père, sa mère, et sa jeune sœur âgée de six ans. Tous. Ces vaillants soldats sont revenus sur les lieux pour brûler le corps. Ne pas laisser de traces…

 

Comme des centaines de femmes et jeunes filles Irakiennes. Violées, il ne leur reste que la prostitution. Phénomène social, inconnu sous la dictature de Saddam, atteignant à présent des chiffres considérables, là encore, occultés par la propagande.

 

L’obsession du sexe en Occident ?... Des milliers d’exemple. Rien que nos campagnes de pub, ne serait-ce que dans la presse féminine, en sont noyées. Mais, non. Pour être un obsédé sexuel, de la possession sexuelle, d’après la propagande, il faut être “enturbanné”.

 

Tahar Ben Jelloun a raison de s’indigner. C’est bien !  C’est beau, un acte solidaire, citoyen, défendre des “valeurs”. Il suffit de ne pas s’égarer dans le manichéisme, sinon l’indignation devient posture. De Tartarin on termine en Tartufe.

 

Regardez le “courage” de nos parlementaires exprimant leur “émotion” et leur “solidarité”, dans un message de soutien officiel de l’Assemblée Nationale, à l’opposante birmane Aung San Suu Kyi qui comparait pour un procès public dans son pays. Eux, si silencieux lors des massacres du Liban, d’Irak, de Gaza, d’Afghanistan. Femmes et enfants, il est vrai, à partir du moment où ils sont musulmans, du moins ceux qui ne mangent pas de camembert et ne boivent pas du vin, n’y ont pas droit…

 

Indignation sélective ?... Racisme ?...

 

Normal en Occident, en matière des “droits de l’homme”, il ne faut jamais confondre la “tendance” et le “tabou”… Le “In”, et le “Out”…

 

Problème : où passe la frontière entre la “tendance” et le “tabou” ?... Où se situe la norme ?... Beaucoup d’intellectuels semblent y perdre le nord. Surtout, quand le gagne-pain est en jeu…

 

 

 

Intellectuels ?...

 

Julien Benda  les fustigeait sous l’appellation de “Clercs”. Du moins, ceux qui trahissaient leur engagement dans des petits calculs partisans, courtisans  ou carriéristes. Au détriment de la défense des valeurs universelles, de la Dignité Humaine.

 

En 1927, il a publié ce grand classique de l’histoire des idées : La Trahison des Clercs (15). La droite de l’époque, extrême ou bien-pensante, fulminait de rage. Juif, elle le traitait de “Rabbi Bendada”. Homme rigoureux, exceptionnel de ténacité, il avait des tripes. Peu lui souciaient injures et diffamations. Peu lui importaient Prix Littéraires et autres colifichets honorifiques. Un exemple pour tous les intellectuels.

 

Et, si Tahar Ben Jelloun, délaissant les Tartines de Tartarinades, avec son talent d’indignation, son courage, nous comblait d’un ouvrage actualisant, dans une suite, celui de Julien Benda ?...

 

Au risque, peut-être, de se fermer les portes de l’Académie française, mais quel panache avec pareil titre :

 

L’Abjection des Clercs !

 

 

 

 

 

 

 

 

(8)  Je fais partie de ceux (nombreux) qui cherchent en vain le moindre écrit de Tahar Ben Jelloun, dans un média francophone, condamnant les atrocités des bombardements de Gaza… J’offre un grille-pain à manivelle au lecteur qui m’en trouvera un.

(9)  Grippe : le massacre des porcs se poursuit en Egypte, Le Monde, 17 mai 2009.

(10) Burgat, François, L’islamisme en face, La Découverte, première publication 1995, dernière mise à jour décembre 2007. Ouvrage indispensable pour comprendre le contexte et les enjeux politiques, au Moyen-Orient en particulier. Excellentes analyses et documentation, d’un niveau introuvable dans les médias français.

(11) Tahar Ben Jelloun, Afghanistan : l'opium et l'obsession de la sexualité féminine, Le Monde, 9 avril 2009.

(12) Je recommande un excellent ouvrage d’initiation ou de vulgarisation sur les religions et spiritualités, avec une iconographie très soignée, Les Grands Maîtres de la Spiritualité, Collection « La Mémoire de l’Humanité », Larousse-Bordas, 1998.

Y sont présentés quelques grands mystiques iraniens qui ont marqué l’histoire de la spiritualité : Al-Hallaj, Ibn Sînâ (Avicenne), Ghazâli, ’Attâr, Sohrawardi, Ibn’Arabi. Ainsi que Djalâl Ad-Dîn Rûmî (admiré de Goethe et Hegel), né en Afghanistan et fondateur en Turquie de la confrérie des Derviches Tourneurs.

(13) Corbin, Henry, En Islam Iranien : aspects spirituels et philosophiques, 2e éd., Gallimard, 1978, 4 vol.

(14) Washington Report on Middle East Affairs, July 2001.

(15) Benda, Julien, La Trahison des Clercs, Les Cahiers Rouges, Grasset, 2003 (première publication 1927).

 

 

 

 

 

Photos d’un échantillon de “Femmes Musulmanes” démontrant leur épanouissement sous la botte “démocratique et droits de l’hommiste” de la soldatesque occidentale. Clichés réalisés par différents auteurs, en Palestine, dont Nayef Haslamoun.

 

 

 

 

 

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24 mai 2009 7 24 /05 /mai /2009 00:30

 

"Au Rwanda, les interventions de journalistes et d'intellectuels haineux jouèrent un rôle essentiel dans la légitimation du génocide, notamment par la désignation quotidienne des Tutsis comme "cancrelats"..."

La Honte - Psychanalyse d'un lien social
Serge Tisseron - Dunod - 2007

 

 

 

Tartines de Tartarinades …

 

Non, ce n’est pas le plat du jour. Juste le “hamburger” quotidien… Junk Food, comme disent nos amis anglo-saxons. Traduisons par “nourriture industrielle”, pour rester poli…

 

Que souhaite nous voir ingurgiter la propagande.

 

De temps en temps, j’aime bien examiner, avec ma loupe et mes pincettes, le degré de “fraîcheur” de cette “nourriture intellectuelle”, servie par nos fast-foods médiatiques.

 

En ce moment, en Afghanistan et au Pakistan, se déroule un des plus atroces nettoyages ethniques de l’époque contemporaine. Plus de 3,4 millions de personnes sont chassées de la vallée de SWAT au Pakistan, frontalière de l’Afghanistan. En fait, un ensemble de vallées.

 

Plus de 3 millions, sous les bombes, dans la famine, la misère, l’exode. A peine le temps d’enterrer ses morts et de charger les blessés sur son dos.

 

Dans l’indifférence…

 

Encore s’agit-il de "statistiques" de l’ONU, dont on sait combien elles sont finement édulcorées. Un carnage et un désastre humanitaire qui vont dépasser ceux vécus, récemment, au Burundi, au Ruanda et au Congo.

 

Il est vrai que l’Occident, dans sa paranoïa musulmane, se doit de “casser” l’Afghanistan et le Pakistan. Comme pour l’Irak. En attendant de passer à l’Iran. Il convient, en conséquence, de “casser” les "résistants". Ceux qui s’opposent aux occupations militaires, aux déplacements de population, aux tueries organisées par des puissances étrangères.

 

Recette classique : les résistants sont qualifiés de terroristes. Mais, le mot s’étant banalisé, la propagande les carbonise médiatiquement dans un raccourci commode, ils sont transformés en “Talibans”. Peinturlurés, dans la fantasmagorie de l’hystérie des médias, en adjoints de Lucifer.

 

Pour raviver l'image phobique, on y rajoute une tranche de sexe. Comme autant de poivre ou de piment rouge. Les Talibans sont des obsédés du sexe, des violeurs. Rien de bien neuf.

 

On nous ressert “La Femme Esclave des Barbus”, dans un scénario assaisonné de psychanalyse de sandwicherie, à la Malek Chebel ou à la Abdelwahab Meddeb. Thème traité par Atiq Rahimi, dans le dernier prix Goncourt, encensé par l’appareil de désinformation. Comme il se doit.

 

Oui, mais le sexe fait vendre dans nos sociétés occidentales. Pour le moment, le marketing du lobby belliciste ne trouve pas mieux pour accrocher le chaland et justifier la barbarie de ses actes quotidiens.

 

Alors, la propagande active ses cuistots chargés d’emballer, de servir, cette cuisine avariée, redoublant d’efforts. Les ingrédients ne pouvant changer, on "relooke", jouant sur la présentation, l’éclairage, le décor, l’uniforme des serveurs. Jusqu’à la tête des serveurs…

 

Cette agitation, face à la réticence de l’opinion publique devant ces massacres à répétition perçus malgré censure et désinformation, me rappelle celle de Tartarin de Tarascon d’Alphonse Daudet et ses fanfaronnades pour chasser le lion en Afrique.

 

Partir à la chasse de ce monstre hybride : le “Taliban-obsédé sexuel-violeur”. Pour sauver la femme afghane, pakistanaise. Par extension : la femme iranienne. Par généralisation : la femme musulmane. A présent, défendre le sexe de la femme musulmane, menacé, maltraité, profané, par “les barbus enturbannés”…

 

Eternelle posture matamore de l’Occident.

 

On en rirait, si contexte et conséquences n’en étaient pas aussi tragiques.

   

 children-AfPakbis.jpg

 

 

Emballage au ruban de soie

 

Les serveurs de ces Tartarinades sont légions. Dans tous les segments de notre société. Je ne m’attarderai pas sur les multiples exemples. Dans ce grouillement, j’en ai retenu quelques uns. Bref rappel…

 

Kouchner, ministre des Affaires Etrangères de la France, on se doit de le citer. En France, il est le chef publicitaire des menus imposés par les officines de la propagande (1) :

“… L'avenir de la démocratie passe par les femmes. Sans les femmes en Afghanistan, il n'y aura pas de progrès. (...)", a déclaré M. Kouchner au dernier jour de sa visite, accompagné du représentant spécial pour l'Afghanistan et le Pakistan Pierre Lellouche (2).

"Nous avons senti dans nos rencontres (...) un courage admirable chez les femmes afghanes", a-t-il souligné.

La situation des Afghanes est dramatique dans ce pays très conservateur. Outre les crimes d'honneur, courants dans les zones rurales, les défenseurs des droits de la femme y sont régulièrement la cible de violences.

… M. Kouchner s'est dit "très attentif" au "combat" des Afghanes, promettant que la France les "soutiendra à fond" si elles s'organisent en un quelconque rassemblement politique”.

 

Dans cette rhétorique, un point intéressant à relever :

“… Le ministre français a également rencontré le président afghan Hamid Karzaï à deux reprises, notamment pour évoquer la liberté de la presse --plusieurs journalistes afghans croupissent en prison pour offense à l'islam, religion officielle-- et l'élection présidentielle du 20 août.

… Ce scrutin sera "un moment décisif de notre présence", a-t-il jugé, car "si les élections sont souillées, apparaissent comme truquées ou incomplètes, si la sécurité n'est pas assurée, alors il sera difficile d'expliquer au peuple français, réticent à cet engagement, le maintien de notre présence" en Afghanistan”.

 

Passons sur l’inévitable relent de cuisine islamophobe :

“… pour offense à l’islam, religion officielle…”, et concentrons-nous sur le propos magique : “élections présidentielles du 20 août prochain”…

 

Ainsi, les femmes Afghanes iront voter “utile”, contrairement à leurs hommes. Ce ramassis de barbus sauvages qui n’ont rien compris à la rayonnante “démocratie occidentale”. Se dirigeant vers les bureaux de vote, lors d’une “Journée de la Jupe”, string déployé, accompagnées de la fanfare de la glorieuse association Ni Putes Ni Soumises… (3)

 

 Comment véhiculer pareilles fables, et faire semblant d’y croire ?...

 

Comment penser, un quart de seconde, que des élections libres, fiables, puissent se tenir dans un pays en guerre, occupé militairement ?...

 

Où sévit une terrible famine dans les campagnes : 8 à 10 millions de personnes souffrent de malnutrition d’après les statistiques officielles (4). Ecrasé de bombes au quotidien.

 

Où déplacements de population, massacres de civils, se succèdent, sans arrêt. Essentiellement des femmes et des enfants. Ces dégâts collatéraux pour lesquels forces d’occupation des USA et de l’OTAN simulent des excuses ou des regrets, dans leurs communiqués stéréotypés. Tout en continuant.

 

Ce ne sont, ce ne seront, qu’élections “truquées”, comme en Irak, où les chefs de tribus dans les campagnes, et les responsables de quartiers dans les villes, votent collectivement, sous la contrainte, apportant le paquet de voix dont ils sont détenteurs, d’après fiches et listings des forces d’occupation, en faveur du candidat qui leur est désigné.

 

Dans les bureaux de vote, car il en faut bien pour la mise en scène médiatique ou lors des tournées bien balisées des “observateurs indépendants”, les votants qui passent par l’isoloir doivent remettre à la sortie, au coin de la rue, les bulletins (interdiction ou impossibilité d’en prendre plus d’un par candidat…) de celui ou de ceux pour qui il ne fallait pas voter, suivant les instructions des autorités. Autres candidatures qui ne sont, dans la plupart des cas, que des figurants consentants. Dans un simulacre de choix électoral.

 

Dans le cas contraire, c’est la suppression assurée de la “carte de ravitaillement” et l’impossibilité d’obtenir le moindre papier administratif. Quand ce n’est pas le passage en salle de tortures…

 

Telle est la réalité de la parodie des “élections” en Irak et en Afghanistan. Telle est la réalité qu’on veut, à présent, imposer à Gaza. Un bulletin de vote “utile”, contre une “carte de ravitaillement”.

 

Mais, Kouchner est sûrement quelqu’un d’honnête.

 

Il n’a simplement pas le temps de vivre avec les populations occupées, terrorisées, affamées, déracinées, jetées sur les chemins sans abri, par la violence des armées occidentales. De s’informer, d’exercer son esprit critique. Il ne sait pas, ne cherche pas à savoir. Trop sollicité. Trop  occupé à diffuser la bonne parole des bienfaits de l’Occident. Pas le temps.

 

Oui. Probablement. C’est la faute à : “Pas le Temps”…

 

Autre genre. Même les snobs, retroussant les manches, rejoignent “la chasse aux barbus”.

 

Fi donc !

 

Dans une émission de TV (5), je regardais la délicate Eliette Abécassis, drapée de soie, ombrée de blush, irisée de mascara, nous recommander son choix d’ouvrages à lire. Parmi eux, celui écrit par une iranienne sur son viol en Iran. Inévitablement.

 

Je n’en ai pas retenu le titre. Simplement les non-dit. Soupirant, combien était détestable “le fanatisme religieux”. Sous-entendu susurré : on ne viole que par fanatisme religieux et cela, évidemment, ne peut se produire que dans des pays musulmans, et plus particulièrement en Iran Chiite…

 

Avec l’assurance, dans la formulation de ses commentaires, d’une double légitimité. Le sujet de sa thèse, nous précise son site officiel, porte sur “Le Mal”. Et, sa famille n’est-elle pas originaire d’un pays musulman : le Maroc ?...

 

Elle a même écrit, nous précise-t-elle, sur le “fanatisme musulman” : “… Dans « Le Trésor du Temple », j’évoque la question du fanatisme musulman à travers une secte. Cela était évidemment lié à une fraîche actualité. Je m’inspire constamment de ce qui anime mon quotidien en terme de faits, d’informations et d’actualités” (­­6).

 

Perle rare : une spécialiste du “Mal”, inspirée “constamment” par les faits, les informations, et l’actualité !…

 

Bizarre, cependant…

 

Elle adore Jérusalem (7), où elle s’est mariée. Bien. Séjournant souvent en Palestine. Formidable, pour une intellectuelle inspirée “constamment” par les faits, les informations et l’actualité. Les témoignages de première main vont fuser, se dit-on…

 

Curieusement, elle ne semble pas y constater, percevoir, sentir, “Le Mal”, lors de ses séjours. Pourtant…

 

Par delà massacres, destructions, humiliations, persécutions, les témoignages, soigneusement occultés par les médias occidentaux, de viols, de tortures sexuelles, de femmes et jeunes filles Palestiniennes dans les prisons israéliennes, abondent

 

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Ne parlons pas des viols des femmes Irakiennes, dans les prisons gérées par les occidentaux dans ce pays proche de la Palestine qu’est l’Irak. Que dire des milliers de femmes et d’enfants tués, mutilés, par les armées d’occupation occidentales, en Afghanistan, qui dure depuis plus de sept ans… Trop loin, peut-être ?...

 

Et, puis, ce serait indécent…

 

Le raffinement, la distinction, l’élégance, c’est cela : voir ce qui doit être vu, dire ce qui doit être entendu, détourner le regard de l’obscène.

 

Normal.

 

Bernard Kouchner, Eliette Abécassis, représentent les archétypes de ceux qui affirment, sur des registres d’expression différents, leur sympathie et leur activisme communautaires.

 

Libre à eux.

 

Laissons donc de côté la “Bonne Foi”, et admettons lucidement que c’est, de la part de ces “responsables” et “intellectuels”, de “Bonne Guerre”…

 

 

 

 

Photos:

i)  Norwegian Refugee Council : « 1000 enfants tués en Afghanistan en 2009 » (1000 children killed in Afghanistan) http://www.nrc.no/?did=9493701

ii) Fillettes Palestiniennes criant leur révolte au passage de la soldatesque d'occupation - AANews Services - juin 2010

 

 

 

 

N.B. Le texte étant tronqué par le serveur, il a été scindé en  deux.

Suite deuxième partie :

Tahar Ben Jelloun et les Talibans : Tartarin et les Lions… (2)

 => Hamburger au hachis de porc

 => Sauce “blue cheese”

 => Trous de gruyère ou de mémoire

 

 

 

 

 

(1)  Tournée diplomatique – Kouchner : “Sans les femmes en Afghanistan, il n’y aura pas de progrès”, Le Point, 16 mai 2009.

(2)  Cf. Pierre Lellouche in : Livre Blanc de la Défense Nationale ou Chèque en Blanc ?...

(3)  Lire le remarquable article de Mona Chollet, Ils ne comprennent que la force, du 12 avril 2009 sur le film, avec Isabelle Adjani, La Journée de la Jupe, http://blog.mondediplo.net/2009-04-12-Ils-ne-comprennent-que-la-force

(4)  Cogan, James, Millions face starvation in Afghanistan, 9 January 2009, http://wsws.org/articles/2009/jan2009/afgh-j09.shtml

(5)  France 2 – TV5 - Télématin

(6)  http://pagesperso-orange.fr/mondalire/abecassis.htm

(7)  “… Elle est attachée à cette ville comme à une personne. Elle s’y marie en 2002. Elle a rencontré son futur époux deux ans auparavant, au cours d’un vol Tel-Aviv-Paris…”. http://www.vsd.fr/contenu-editorial/en-coulisses/cv-de-stars/849-eliette-abecassis

 

 

 

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28 novembre 2008 5 28 /11 /novembre /2008 14:32

 


Suite du (1)

 


L’Imbécillité Tragique de “l’Intelligentsia” Française                       

 

 

La lecture de “Syngué Sabour” m’a procuré la même sensation que ces barquettes de plats préparés d’hypermarché. Transitant par le micro-ondes, avant ingestion et digestion. “Produit” parfaitement calibré pour le marché français, et occidental. Dans le business de l’édition, les traductions ou les cessions de droits à l’export, avec si possible des adaptations cinématographiques, sont planifiées pour diffuser un “produit vendable”. D’où, la nécessité de réunir les ingrédients basiques.

 

On retrouve, dans ce Goncourt, le cocktail d’astuces indispensables aux bonnes ventes dans l’édition bien de chez nous : violence, incitation à la haine raciale et religieuse, à mots couverts bien sûr car il convient de respecter un minimum de convenances, femme “victimisée” pour ratisser du côté des organisations féministes ouvrant grande la promotion dans les magazines “féminins”. Et, ingrédient essentiel : du sexe…

 

Dans Syngué Sabour, tout y est. Parfaitement dosé. Tous les clichés sont là pour plaire à la cible de clientèle, le “bobo” occidental, flatter son racisme et stimuler sa libido fatiguée par le stress…

 

Tranches de sexe, entrelardées d’une couche de voyeurisme, alternant avec les imprécations de “la femme” contre les hommes et son pays, personnage central du roman, dont on ne connaîtra pas le nom. Un coulis de sauce sanguinolente, pour fin, car il faut bien une fin en apothéose : la femme se faisant fracasser la tête par son homme, contre un mur, sur le sol. Rêve ou réalité, le fait est là. Pour bien signifier le “sort tragique de la femme Afghane”.

  

Pour toile de fond, une femme veille un homme dans une maison. Son mari. Dans une demie folie.

 

Plagiat, pur et simple, du thème et du cadre d’un des chefs-d’œuvre de l’écrivain espagnol Miguel Delibes, Cinco horas con Mario, publié en 1966 et traduit en français en 1971, sous le titre de Cinq heures avec Mario. Même monologue d’une femme devant le corps de son mari décédé, l’accablant de reproches et exprimant ses frustrations devant son incompréhension.

 

Il est dans le coma, sous perfusion, blessé dans des combats. Ambiance de guerre. Elle soliloque, prenant son homme pour "pierre de patience".

 

On entend les bruits extérieurs : tirs, chenilles et moteurs de char d’assaut, cris.

 

Quelle guerre ?... Une de celles, successives, imposées par les envahisseurs de l’Afghanistan, Russes, Américains, coalisés occidentaux de l’OTAN ?...

 

Chut ! Tabou ! Nous n’en saurons rien.

 

Des hommes entrent et sortent, en hurlant, fouillant la maison, malmenant le blessé. Ils portent des “turbans noirs”. Se ravisant de leur méprise. Nous sommes bien en Afghanistan. Mais on ne voit, ni n’entend, jamais, des soldats casqués, vêtus d’uniformes étrangers au pays, défonçant des portes, saccageant des maisons, bombardant, mitraillant, criant des ordres dans une langue inconnue des dialectes locaux. Jamais.

 

Des Corans un peu partout, certains traînent par terre, des hommes qui prient, sans bien savoir ce qu’ils font, ni ce qu’ils disent. Des mollahs qui “crient” pour appeler à la prière, n’appréciant pas que “la femme” ait ses règles. Les mollahs, cliché oblige, ne peuvent que crier et être allergiques aux règles des femmes.

 

Des pères méprisés par leurs fils, pour cause de folie. Suivant, à l’interligne près, le catalogue des stéréotypes : dans ce pays de barbares, le sens, la valeur de la famille, sont inconnus. On enfonce le clou, par la tragique histoire de “la tante” exclue de la famille, pour stérilité, finissant dans “une maison close”. Manque, toutefois, le coup de la femme à qui on a “brûlé le visage à l’acide”. Peut-être qu’au moment de l’écriture du roman, les officines de désinformation n’avaient pas encore mis la touche définitive au scénario…

 

Nous sommes bien en “terre d’Islam”.

 

Les hommes y sont noircis encore plus que les turbans dont les affublent l’auteur, à longueur de page.

 

Les hommes ?...

 

Dans ce pays de musulmans sauvages, ils ne peuvent être que des brutes. Aux “turbans noirs”. Aghhh !... Le “turban noir”, l’auteur en fait une fixation. Probablement pour que le lecteur remarque le génie inventif dans le cliché : avant on disait les “barbus”, maintenant on dira les “turbans noirs”…

 

Des obsédés sexuels qui ne savent que se “branler” en “matant”, par une fenêtre, l’héroïne du roman lorsqu’elle prend son bain, pour reprendre les propres termes de l’auteur. On aura droit à la description complaisante de sa masturbation d’une main, tenant de l’autre le sexe inerte du comateux. Puis, pour varier le menu, on assistera à son dépucelage d’une jeune brute, ensuite à ses coucheries avec le même ou on ne sait trop...

 

Quel imaginaire ! Quel souffle romanesque !...

 

Confondant érotisme et pornographie, sensualité et vulgarité de sex-shop.

 

Je ne suis pas un intégriste de la pruderie. Ce qui me met à l’aise pour considérer cet “ouvrage” comme un concentré de folklore islamophobe, sous cellophane porno, empaqueté dans un style de notice de garantie de machine à laver. Sauce : “diabolisation de la résistance afghane”.

 

 

 

 

 

Ça, Prix Goncourt ?...

 

Je me suis interrogé sur les motivations, les critères de sélection des membres du Jury. A se demander s’ils ont lu le livre. Me posant la question :

“Comment en arrive-t-on à primer dans un pays réputé, à tort ou à raison, de grande culture, une telle barquette ?...”.

 

Les commentaires (8) des membres du jury me laissent perplexe. Parmi les ténors :

=> Edmonde Charles-Roux, présidente du Prix Goncourt : “C’est un livre qui défend la cause des femmes”. Ah, bon ?...

=> Françoise Chandernagor: “Le livre s'est imposé par son actualité. L'Afghanistan est un pays qui nous intéresse et qu'on cherche à comprendre” (9). Ah, tendance !...

=> Bernard Pivot : “C'est important que le Goncourt renoue avec la tradition qui consiste à parler du monde”. Parlant d'une « double audace », qui va sans doute « faire polémique » parce que « Syngué Sabour » aborde la question de la condition de la femme…”. Ce qui s’appelle du “marketing de publication” ou de “l’argumentaire publicitaire”…

 

Polémique ?... Soyons sérieux : le jury nous sert un charabia de vendeurs de lessives. Pas plus. Certainement pas, une approche de découvreurs de talents.

 

Evidemment, les critiques, suivent, dans un mouvement moutonnier, tonalité et tempo imposés par les médias. Les commentaires imbéciles se multiplient. Parmi les perles glanées, je vous en propose une, représentative de toutes les autres:

“… Et en « révélant » cette vérité des femmes en terre d'islam, Atiq Rahimi se veut aussi « prophète » d'un changement, d'un espoir...”. (10)

 

A désespérer de l’intelligence …

 

Auteur Franco-Afghan ?... Le dossier de presse repris à l’identique d’un journal à l’autre, ou d’un hebdomadaire à l’autre, coquilles comprises, nous en dresse le portrait.

 

On apprend ainsi que l’auteur, installé en France pendant l’occupation soviétique, appartient à “l’aristocratie du pays”. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est le journaliste de L’Express (11). Béat d’admiration.

 

Ce fils d’aristocrate afghan”, dont le père était gouverneur de la vallée du Panchir, a fait toutes ses études au Lycée français de Kaboul. Oubliant de préciser que les frais d’inscription et les places disponibles au Lycée français de Kaboul sont, effectivement, inaccessibles à qui n’est pas un rejeton de la nomenklatura. Ou, de “l’aristocratie” par euphémisme.

 

Appartenir à la jeunesse dorée d’un pays n’est pas une tare. L’essentiel est l’utilisation ultérieure de la chance qu’on a eue… Pour son pays, et l’avenir de la collectivité à laquelle on appartient.

 

L’auteur partage son temps entre sa résidence en France et l’Afghanistan. Où, nous dit-on, “… il est l’auteur à succès d’une sit.com, d’une « StarAc » du rire et du business” !...

 

C’est pas beau la culture d’un “aristocrate” retournant apporter “la modernité” dans son pays ?... Un exemple de dépassement des tabous de sa culture d'origine, comme dirait l’éditorialiste du journal Le Monde. Cet “aristocrate” me fait penser aux aristocrates français qui s’en retournaient d’exil “dans les fourgons” des armées coalisées, caricature d’alors, à la chute de Napoléon. Pour restaurer la monarchie, avec Louis XVIII …

 

Au passage, le dossier de presse assimile le quartier de Kaboul, où sont concentrés les occidentaux et les membres de l’oligarchie locale, de “l’aristocratie”, avec le pays tout entier. Belle manipulation de l’information. Comme si le reste du pays avait le temps, et les moyens, de s’intéresser à la « StarAc » d’Atiq Rahimi…

 

Au-delà de l’éclat de rire qu’il provoque, ce dernier point est à retenir.

 

Il illustre, prenant en défaut la propagande occidentale, le fossé abyssal entre une nomenklatura et le reste d’une nation occupée, colonisée, par des forces étrangères. C’est-à-dire, sa quasi-totalité. Avec le rôle souvent désastreux des centres culturels étrangers, véhiculant un colonialisme implacable derrière le rideau culturel. Ces “élites”, occidentalisées à outrance, sont détestées, méprisées, dans leur pays.

 

Loin de représenter le progrès ou la modernité, elles ne sont considérées que comme des relais de l’oppression et du pillage colonial. Des “collabos”. Lors des dernières émeutes populaires en Côte d’Ivoire, si des jeunes ivoiriens ont saccagé le “centre culturel” français d’Abidjan, ce n’est pas parce qu’ils étaient “sauvages”, contrairement à la caricature raciste de la propagande médiatique française, mais parce que ce symbole “d’aliénation” leur était insupportable.

 

Le plus grave est de voir certaines “élites” adopter les thèses coloniales, à l’encontre de leur propre pays, jusqu’aux extrêmes. Ainsi, concernant l’Afghanistan, la rhétorique classique des colons expliquant la révolte populaire, contre leur autorité, par la présence et l’action “d’étrangers”, venus de l’autre côté de la frontière de leurs possessions ou de leurs conquêtes.

 

Révolte ? Jamais de l’intérieur du pays conquis. Impossible. Impensable. Parce que la population locale, ne peut qu’éprouver vénération pour ses oppresseurs, apporteurs de civilisation et de démocratie.

 

Se développe, à présent, la théorie fondant la paix en Afghanistan, autrement dit l’acceptation de la colonisation occidentale, par l’attaque et l’occupation du Pakistan. La finalité des “ziocons”, partisans acharnés de cette stratégie qu’ils ont réussi à imposer à la France et à L’Europe, étant de “l’exploser”, ultérieurement, entre plusieurs micro-Etats indépendants sur une base ethnique.

 

Ecoutons, lisons, l’incantation des chamans “ziocons”, reprise à l’identique, par Atiq Rahimi :

 

“Il y a une zone tribale entre l'Afghanistan et le Pakistan où sont installés non seulement les talibans et tous les terroristes venus du monde entier, qui créent leurs écoles militaires et coraniques, qui endoctrinent les jeunes gens désespérés, qui les envoient pour mener des opérations-suicides et pour tuer des populations afghanes et les soldats de la force internationale.

Ensuite, une fois l'opération terminée, ils rentrent au Pakistan. Il faut donc se poser la question de savoir d'où viennent leurs armes et leur argent. A mon avis, il faut s'attaquer aux sources. Mener uniquement des opérations de protection en Afghanistan, cela ne sert pas à grand-chose...”. (12)

 

Incontestablement, avec pareil acte d’allégeance brandi à bout de bras, voilà un “auteur-aristocrate” dont carrière, gloire et richesse, sont assurées …

 

 

 

L’Islamophobie Tragique de “l’Intelligentsia” Française                  

 

 

Raisonner par clichés, préjugés, à l’égard des “Autres”, sans au préalable s’informer, se documenter, échanger, discuter, visiter, vivre avec, est le symptôme de l’imbécillité. Imbécillité qui accable l’intelligentsia française, du moins celle qui est médiatiquement visible.

 

Loin de jouer son rôle moteur d’éclaireur, de découvreur de talents. Loin de susciter approches nouvelles, compréhension du monde, dans le respect et l’empathie à l’égard des civilisations et peuples différents, elle ne véhicule que bêtise, fondée sur le mépris, l’intolérance. Justifiant, ainsi, la violence armée à leur égard.

 

Le fondement de cette imbécillité est une pulsion viscérale, un conditionnement profondément ancré dans l’inconscient collectif de l’intelligentsia : l’islamophobie. Edward Saïd, longtemps professeur de Littérature Comparée à Columbia, en a donné les clés.

 

Dans deux ouvrages fondamentaux, pour qui veut comprendre ce phénomène de perversion de l’intelligence et du savoir, dont je recommande toujours la lecture. Qu’on me pardonne, mais je ne dispose que des éditions en langue anglaise : Orientalism et Culture & Imperialism (13).

 

L'ethnocentrisme, ce racisme sous camouflage “intello”, justifiant toutes les entreprises coloniales. A présent, l’invasion et l’occupation de l’Afghanistan. Le prétexte de la chasse au terroriste ne pouvant l’expliquer à lui seul. Avec comme pivot de propagande : “le sort tragique de la femme afghane”. Pour faire pleurer dans les chaumières et provoquer l’adhésion.

 

Micheline Centlivres-Demont, à la suite de ses travaux d’ethnologue, a été une des premières à dénoncer l’instrumentalisation de la femme afghane :

« … il y a le discours sur la femme aliénée, dominée ; il y a la femme sous le châdri, qui est pris comme symbole extérieur de l’aliénation féminine. La grande majorité des femmes en Afghanistan ne portent cependant pas le châdri, mais un simple voile de tête. Le châdri est un phénomène urbain, récent. Son port correspond à l’accession à la petite et moyenne bourgeoisie. C’est une forme de promotion. » (14)

 

Remettant en cause l’hypocrisie des “analyses” de la réalité afghane :

« … L’enjeu principal de la plupart des “analyses” n’étant pas tellement de dire ce qui se passe en Afghanistan… il faudrait peut-être … montrer qu’elle (cette analyse) est ethnocentrique, et …(cette analyse ethnocentrique)  interdit de penser le problème de la femme. » (15)

 

Stigmatisant l’ethnocentrisme maladif, et mensonger dans leurs conclusions hâtivement ou habilement construites, des praticiens de la désinformation :

« … les Occidentaux se représentent les femmes d’Afghanistan à partir d’une condition telle qu’ils ne peuvent décrire sa situation que comme archaïque, réactionnaire, féodale. Pourtant dans mon travail d’ethnologue, je me suis trouvée souvent dans une situation paradoxale où c’était moi que les femmes afghanes plaignaient…

… La femme se trouve ainsi au centre d’un réseau de relations qui passe en dehors du mari et qui ne correspond pas à l’image qu’on a chez nous de la famille, du couple, du ménage.

… C’est dans les villes que l’on rencontre les cas les plus tragiques d’aliénation féminine, non dans les campagnes…

… Ce que je veux critiquer, ce sont les images toutes faites de l’arriération ou du progrès calquées sur nos propres représentations. » (16)


Effectivement dans des villes, Kaboul et Kandahar essentiellement, des femmes isolées socialement, non protégées par leurs familles ou leurs clans, ont eu à subir des violences inadmissibles. Comme dans tous pays livrés à l’anarchie provoquée par des guerres, permettant l’accès temporaire au pouvoir de factions violentes et radicales.

 

Mais, s’il s’agit d’être honnête, il convient de ne pas oublier cinq points fondamentaux :

i)  Dans un pays ravagé, pendant plusieurs décennies, dans des guerres imposées par des envahisseurs successifs, les enfants et les hommes en sont autant victimes que les femmes.
ii)  L’amélioration de la condition d’un peuple, sexes et âges confondus, a pour fondement la paix.
iii) La paix a pour fondement l’arrêt immédiat de toute occupation étrangère et le respect du droit, du peuple concerné, à l’autodétermination de ses choix politiques.

iv)  Les luttes d’influence ou rivalités éventuelles, suite au départ des envahisseurs, sont à résoudre par le peuple lui-même. Comme nous, occidentaux, l’avons fait au cours de notre histoire dans nos propres pays. Elles n’ont pas à servir de prétexte hypocrite au maintien d’une occupation militaire.
v) L’autodétermination a pour fondement le respect des intérêts économiques de la nation concernée, dans l’exploitation à son profit de ses ressources naturelles, avec son intégration équitable dans les échanges économiques internationaux. Excluant la pratique criminelle de l’embargo, dont femmes et enfants sont les premières victimes.

 

Oublier ces points, ne serait que pratiquer du misérabilisme médiatique, le “marketing des bonnes causes”, avec pour finalité la justification d’une colonisation et des horreurs qui la sous-tendent inévitablement. Dans le cas de l’Afghanistan : justifier la présence de nos troupes.

 

Oublier ces points ne serait que jouer aux Belles Âmes, incapables d’expliquer ces silences :

 

Qui se soucie du sort tragique, depuis ces soixante dernières années, de la femme Palestinienne  ?... La Palestine ?... “Jamais entendu parler”, vous diront les Belles Âmes…  Leurs connaissances en géographie font penser à celles des géographes du 15° siècle. Quand on ne connaissait pas un territoire, ou une partie de la planète, on marquait  sur les cartes et mappemondes : Terra Incognita

 

La femme Irakienne ?... Son sort tragique ?... Pays laïc, avant sa destruction par l’Occident, où la femme avait le meilleur statut social de la région. Un des plus enviés, malgré la dictature. Elles occupaient les plus hauts postes dans l’armée, l’enseignement, l’administration, les entreprises, la recherche. A présent, misère et prostitution des femmes, inconnues jusqu’à l’invasion, explosent…

 

Qui se soucie du sort tragique de la femme latino-américaine, bolivienne, kenyane, mozambicaine, ivoirienne, congolaise, sud-africaine, indienne ?... L’espérance de vie dans les régions pauvres de ces pays tourne autour de la quarantaine d’années. Encore moins, pour les hommes.

 

Qui se soucie de toutes celles qui crèvent de misère, de faim, de maladie, dans le pillage des richesses de leurs pays par les multinationales, via les dictatures ou simulacres de démocraties, imposées par les armes occidentales ?...

 

Dans nos contrées hyper riches, que dire du sort tragique des femmes et des hommes qui meurent de faim et de misère ?... En France, les femmes “travailleuses pauvres”, figurant dans les 2 millions vivant en dessous du seuil de pauvreté, dont 30 % renoncent à se soigner, incapables d’accéder aux mutuelles. Pays dans lequel, en plein Paris, au Bois de Vincennes, on trouve ce mois-ci trois hommes morts de froid. Dans un parc où survivent sans abris, plus de 200 personnes.

 

Dans nos contrées hyper riches, que dire du sort tragique de ces jeunes femmes, vêtues à la dernière mode, qu’on peut voir tous les samedis soirs sortant des pubs, en plein centre de Londres, ou dans d’autres capitales occidentales, titubant sur leurs talons aiguilles, minijupes ras des fesses, épaules dénudées, même dans le froid, vomissant dans les caniveaux, s’affaissant sur le trottoir ?... Ivres d’alcool, quand ce n’est pas de cocaïne, ou des deux à la fois. Le Binge. C’est ainsi qu’on appelle ces soirées où on se “défonce” collectivement, chaque fin de semaine, pour satisfaire l’aliénation imposée par la “société de consommation”.

 

La dignité humaine n’a ni sexe, ni couleur, ni religion, ni frontière. C’est son respect qui donne une âme à une civilisation, à une communauté.

 

Une intelligentsia qui instrumentalise le cas du “sort tragique” de la femme d’un pays, pour en justifier le bombardement, l’occupation militaire, trahit sa vocation et sa conscience. Se donnant, à bon compte, bonne conscience. Jouant, en histrion, les Belles Âmes.

 

Restons lucides.

 

Atiq Rahimi n’est que la énième mouture de ces écrivains à la mode dans les médias de la propagande. Issus des pays qui ont eu à subir, ou qui subissent, la colonisation occidentale, qu’ils soient “francophones”, “anglophones”, “hispanophones” ou autres. Instrumentalisés, il ne leur est pas demandé du talent, comme l’a magistralement démontré Edward Saïd dans son œuvre, mais simplement de savoir agencer les clichés souhaités par le colonisateur. Les exceptions, confirmant la règle.

 

Ce n’est que le filon exploité, chez nous, par certains auteurs “francophones”, maghrébins et libanais en particulier, qui ne savent décrire “la femme” de leurs pays, “en terre d’Islam” comme on dit, qu’en folle, prostituée, loque écrasée de chagrin, victime d’hommes arriérés, de sombres brutes, dotés d’instincts primaires. Dans une société où le rire, la joie, le plaisir et la fête sont inconnus.

 

Quant aux guerres, occupations, tortures, massacres, humiliations, pillages imposés par l’Occident à leur pays, à leur peuple, à leur culture, à leurs racines, à leur Histoire : silence !

 

Ecriraient-ils le contraire, qu’ils ne trouveraient aucun preneur de leur camel crap.

 

Certains vont plus loin. Le “must” : cracher sur la religion de leurs parents et de leur enfance. Même s’ils en connaissent à peine les rudiments. L’important étant la provocation. Lorgnant, au passage, la fortune de Salman Rushdie. Décrocher la fatwa d’un illuminé crédible, et, présentés en champions de la liberté d’expression, c’est le jackpot médiatique

 

En soutiers de la culture coloniale, ils alimentent en charbon, la chaudière islamophobe. Assurés, ainsi, de vendre et prospérer. Se baladant de prix littéraires, en centres culturels, studios de radios, plateaux TV, interviews magasines, et salons du livre. Or, gloire et renommée… Que ne ferait-on pas ?...

 

Paix à leur conscience…

 

La mentalité coloniale, antimusulmane, se porte bien. Propagande, manipulation et intox, aussi.

 

Nos “littérateurs” du cirque médiatique, confits de bêtise et de racisme, ronronnent de satisfaction.

 

Le Business des marchands de canons tourne à plein régime.

 

Les Belles Âmes, repues d’autosatisfaction, en rotent de contentement.

 

Tout va pour le mieux, dans le meilleur des mondes…

 

 

 

 

 

 

(8)   http://bibliobs.nouvelobs.com/20081110/8480/francoise-chandernagor-le-livre-de-rahimi-sest-impose-par-son-actualite

(9)   Pour ceux qui voudraient s’informer sur l’Afghanistan (y compris sur les mécanismes du marché de l’opium), plus sérieusement que Françoise Chandernagor, je suggère le splendide livre, avec des photos magnifiques et le témoignage émouvant d’un français ayant vécu aux côtés des résistants afghans du temps de l’occupation soviétique : Afghanistan – Visions d’un partisan, de Stéphane Allix, Editions Transboréal, mai 2003.

(10)  http://l-or-des-livres-blog-de-critique-litteraire.over-blog.com/article-24239899.html

(11)  http://livres.lexpress.fr/entretien.asp/idC=14405/idTC=4/idR=5/idG=

(12)  Rahimi, Atiq, “Je me bats avec les mots”, Le Monde, 12 novembre 2008.

(13)  Saïd, Edward,

=>   Orientalism, Penguin Books, London, 2003 (first published 1978).

=>   Culture & Imperialism, Penguin Books, London 2003 (first published 1993).

(14)  Centlivres-Demont, Micheline, Op. Cit.  p.288.

(15)  Centlivres-Demont, Micheline, Op. Cit.  p.288-289.

(16)  Centlivres-Demont, Micheline, Op. Cit.  p.290.

 

 

 

 

 

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28 novembre 2008 5 28 /11 /novembre /2008 14:14

 

" Quelle bénédiction que le communisme, sans lui tous ces dissidents n'assureraient d'aucune crédibilité leurs médiocres talents. Du moment que la vache est "de l'Est", réfugiée, expatriée, vomisseuse de "démocratie populaire", c'est une grande génisse de l'Ecriture ! Scandale salaud qu'il faudrait dénoncer ! "

Marc-Edouard Nabe (*)

 



Défilés de mode ou Prix littéraires, j’y jette toujours un œil. S’amuser, un peu, dans le futile et les paillettes. On y voit ce qui n’est jamais porté. On y lit ce qui s’oublie toujours.

 

Le jury du prix littéraire français le plus célèbre, le Goncourt a primé, cette année, un livre intitulé : “ Syngué Sabour – La pierre de patience” (1). L’auteur, Atiq Rahimi, présenté comme Franco-Afghan.

 

J’en avais aimé le titre, à sa lecture sur la liste des  “nominés”, quelques temps auparavant. Référence aux légendes orientales où chagrins, espoirs et secrets sont confiés à une pierre dite “de patience”. Parce qu’il en faut, pour écouter l’âme humaine…

 

Le thème annoncé étant une femme Afghane prise dans les tourments de la guerre, je m’étais dit : Enfin ! Quelqu’un qui va nous présenter une autre vision que le cliché habituel de la propagande coloniale sur la femme Afghane.

 

 

Malalaï de Maïwand

 

 

Avant de me procurer le livre, j’espérais, d’Atiq Rahimi, la mise en scène romanesque de la femme Afghane la plus célèbre et vénérée dans son pays, et au-delà : Malalaï (2). Héroïne de la seconde guerre anglo-afghane (1878-1880).

 

Fille d’un berger luttant contre la violente occupation britannique de l’époque, aux côtés de son père, de ses frères, de son mari, de son village, de son clan. Comme beaucoup de femmes Afghanes soutenant  “leurs hommes”, résistants, combattants. Transportant, pour eux, nourriture, munitions. Chargeant les fusils, nettoyant les armes ou assurant les soins.

 

Malalaï, aussi belle, féminine que courageuse. Extraordinaire personnage, dans un pays au relief grandiose et au contexte historique épique, dont la vie est un creuset où aventures et sentiments, doute et témérité, peur et volonté, donnent une fusion flamboyante pour mille pages d’un roman, sans lasser le lecteur. Pour qui voudrait l’écrire…

 

Elle participa à la bataille de Maïwand, le 27 juillet 1880, contre les anglais. Avec d’autres femmes. L’une d’elles avait même le grade de colonel d’artillerie dans l’armée afghane…

 

Voyant les combattants Afghans plier devant la puissance de feu des anglais, équipés de fusils à cadence de tir plus rapide et à portée plus longue, Malalaï les encouragea en chantant des poèmes à la gloire de leur nation. Reprenant le drapeau d’un combattant qui venait d’être tué devant elle. Jusqu’à ce qu’un tireur anglais ne réussisse à la tuer, à son tour. Foudroyée par une balle.


Son action, sa mort, furent décisives, d’après Ayub Khan le dirigeant Afghan présent, galvanisant les troupes afghanes qui remportèrent une victoire. Le nom de Malalaï est porté par de nombreuses femmes Afghanes, depuis. Pour éviter toute confusion, on précise donc : Malalaï de Maïwand.

 

Les Suisses partagent de profondes similitudes avec l’Afghanistan, même si leur pays est 16 fois plus petit, avec 4 fois moins d’habitants (3). Par ses montagnes, sa mosaïque de vallées, de dialectes, de clans, de communautés autonomes. Tour à tour s’affrontant au cours des siècles, mais se fédérant à la première tentative d’un envahisseur de conquérir le pays. Donnant, ainsi, d’excellents ethnologues et historiens de l’Afghanistan.

 

Micheline Centlivres-Demont, avec son mari Pierre, est une de ces spécialistes qui a le mieux compris ce pays et leurs femmes. Elle a eu accès à la compréhension de la femme Afghane du fait qu’elle était une femme. Surtout, une femme, ethnologue, sans préjugé.

 

Elle rappelle le rôle fondamental de la femme Afghane dans l’identité de la nation. Sa participation, souvent en première ligne, dans la résistance à l’occupant étranger :

« … dans la tradition pachtoune, dans certaines circonstances, la femme peut-être porteuse d’un courage exceptionnel que même les hommes n’ont pas. L’héroïne surgit. Alors que d’habitude elle n’a pas sa place dans la vie publique, à des moments de crise extrême, elle apparaît, c’est elle qui sait montrer l’exemple aux combattants, c’est elle qui meurt en première place, et si elle se dresse contre l’envahisseur, c’est tout comme Malalaï s’était dressée en 1879 contre l’occupant anglais.»  (4)

 

Ce n’est pas l’opium qui permet aux combattants Afghans de résister à la sauvagerie de l’occupation actuelle de la coalition occidentale, pas plus que leur armement dérisoire face au colossal arsenal de l’OTAN et des USA, ce sont : leurs femmes. Sans leur feu vert, leur soutien absolu, ils ne bougeraient pas le petit doigt.

 

Le gogo occidental, asphyxié de propagande, ne l’a pas compris. Par contre, le traîneur de sabre : oui.

 

Observez. Lisez les statistiques. Parmi les cibles privilégiés, notamment des forces aériennes des armées occidentales, vous trouverez systématiquement : noces et mariages. Ce qui fait dire à l’intellectuel américain Tom Engelhardt, avec rage et désespoir : “… Nous sommes devenus une nation d’écraseurs de fêtes de mariages… d’annihilateurs de célébrations de noces…”. (5)

 

Pourquoi ?...

 

Simple : ce sont des manifestations où sont concentrées femmes et jeunes filles, dans la célébration de fêtes regroupant souvent plusieurs villages. Bombarder un mariage, c’est pouvoir tuer le maximum de femmes. On “casse” de la femme afghane à coup sûr. Et, bien sûr, au passage plein d’enfants.

 

Les soudards occidentaux pensent, ainsi, “casser la colonne vertébrale” de la résistance. La formule a été rodée en Irak. Et cela ne coûte, à chaque fois, qu’un communiqué de l’OTAN regrettant ce fâcheux incident, après l’avoir démenti pendant plusieurs jours…

 

A cela s’ajoute à présent, au bout de 7 ans d’occupation occidentale, une famine organisée en plein hiver pour “casser définitivement”  la résistance et rendre la population dépendante de l’aide alimentaire extérieure au pays. La famine, arme ultime pour faire “craquer” la femme Afghane, ne pouvant supporter la vision de ses enfants affamés.

 

Famine, démantèlement des circuits de production et d’échange, méthodes classiques de toute colonisation occidentale, mais modernisées dans leurs applications contemporaines, rodées ces dernières décennies en Palestine, notamment dans la zone de Gaza. Gaza, qui avec ses 1,5 millions d’habitants sert de laboratoire, au 21° siècle, à toutes les techniques et pratiques “managériales” d’asservissement et de destruction identitaire d’un peuple.

 

Observez, encore : drones et satellites militaires capables de “lire une marque inscrite sur une balle de golf”, nous affirment avec fierté les marchands de canons, se révèlent incapables d’identifier une noce ou un mariage, de discerner entre la célébration d’une fête et un commando de combattants…

 

Pas plus que de repérer et suivre le transport des 8.000 à 10.000 tonnes d’opium qui sortent du pays chaque année. Premier producteur d’opium du monde, d’après les statistiques de l’ONU, s’étonnant de voir la production décupler depuis le début de l’occupation par la coalition internationale… Production dont on retrouvera le produit de la vente, après conditionnement et distribution sur les marchés internationaux, dans les paradis fiscaux.

 

Raisonnons un peu.

 

Sachant que la circulation, sur les rares routes et chemins afghans praticables, est sous constante surveillance. Je prends l’hypothèse basse de 8000 tonnes/an, 1 tonne par camionnette cela représente : 8000 camionnettes. Si je les transporte avec des camions de 15 tonnes, cela ferait plus de 530 camions, en les bourrant jusqu’au plafond… Je fais abstraction de l’hypothèse du transport par des ânes, à raison de 100 kg par âne, cela ferait un cortège de 80.000 ânes…

 

Par an… Traversant, ni vus ni connus, tous les barrages des troupes occidentales… A la barbe des drones, et à la moustache des satellites espions… Invisibles.

 

A moins que cela ne voyage par avions, comme du temps de la guerre d’Indochine, avec les bons soins de l’armée française, ou de la guerre du Vietnam, avec ceux de l’armée américaine ?... Planant. Pendant que civils et soldatesques s’étripaient dans la rage des tueries, au sol. Plusieurs livres et films ont évoqué cette industrie gérée par les “services spéciaux”. Pour le compte de qui ? C’est une autre histoire. Désigner serait se suicider…

 

Bizarrement, toute cette technologie de surveillance et de renseignement, de haute précision, en mesure de repérer le moindre conducteur de mobylette, Oussama excepté, dans les villages les plus reculés, se révèle myope dès qu’il s’agit de fêtes de mariage, ou aveugle dès qu’un transport d’opium déambule dans la nature afghane. C’est pourtant plus gros qu’une balle de golf, un tambourin de mariage, une camionnette, un camion de 15 tonnes ou un C130 !…

 

Trou noir, intersidéral, galactique.

 

Les trafiquants d’opium, quant à eux, se portent très bien, s’en mettent plein les poches et leurs comptes bancaires, à Dubaï ou ailleurs, débordent de cash. Ceux de leurs complices et commanditaires, aux mirifiques profits, aussi. Rappelons-le au lieu de l’occulter, ceux qui s’enrichissent le plus dans ce trafic sont, nous le savons tous, essentiellement occidentaux.

 

Mais, les femmes Afghanes avec leurs enfants sont systématiquement confondues avec les Talibans… Lesquels n’existent plus d’ailleurs, puisqu’il s’agissait d’un agrégat de formations politiques dissoutes depuis l’invasion du pays en 2001. Les mouvements de résistance actuels, d’essence essentiellement régionale et clanique, n’ont plus rien à voir avec cette mythologie occidentale entretenue par la propagande.

 

Tueries de femmes et d’enfants ?... Erreurs techniques et éminemment regrettables, ne cessent donc de répéter les communiqués militaires de l'OTAN… Que voulez-vous, on fait de notre mieux, ce ne sont que dégâts collatéraux inévitables pour implanter démocratie et civilisation

 

Qu’importe, pour les Belles Âmes, le droit des femmes sous les bombes occidentales (6) …

 

Qu’importe, pour les Belles Âmes, que les femmes Afghanes et leurs enfants crèvent de faim sous l’occupation occidentale …

 

Au bout de 7 ans d’occupation !

 

Avec des milliards de dollars et d’euros d’aides détournées dans les paradis fiscaux. Les marionnettes corrompues, servant de “gouvernement démocratiquement élu”, façade en carton-pâte pour abuser l’opinion publique internationale, ne recueillant que les miettes de ces détournements…

 

Marionnettes tellement utiles comme alibi, paravent, jusqu’aux détournements. Car, cette guerre comme toutes les guerres coloniales enrichit, en Occident, une oligarchie de responsables du Business de l’armement et des politiciens à leur solde, qui ont intérêt à ce qu’elle dure le plus longtemps possible.

 

Dès l'éditorial triomphant du journal Le Monde, annonçant les Prix Littéraires 2008, j’ai compris l’arnaque : tout va être bon pour justifier, accroître et prolonger le plus longtemps possible, notre engagement colonial en Afghanistan. Pour l’enrichissement exponentiel et fulgurant de notre nomenklatura.

 

Les campagnes de désinformation vont faire flèche de tout bois. Normal, quand les sondages, censurés par les médias, démontrent que plus des deux tiers de l’opinion française, comme dans les autres pays européens, sont contre l’aventure coloniale en Afghanistan. Aventure soumise à référendum, elle serait rejetée aussitôt à une écrasante majorité. Rejet redouté des politiciens, comme pour la Constitution Européenne…

 

Lisez cet éditorial : “La langue de la liberté” (7). Célébrant les écrivains qui :

“… comme Rahimi, ont choisi la liberté de la langue française pour dépasser les tabous de leur culture d'origine et faire parler une femme autrement réduite au silence, presque à l'inexistence, par la burka afghane”.

 

Le français “langue de la liberté”, alors que nous soutenons militairement les pires dictatures en Afrique et une atroce guerre coloniale en Afghanistan. Alors que nous soutenons politiquement tous les abus contre la dignité humaine, toutes les violations des Conventions de Genève, crimes de guerre et crimes contre l’humanité, en Palestine ou en Irak…

 

Quand le cliché dithyrambique atteint ce point d’hystérie, dans la propagande coloniale, je me demande toujours : “… comment en arrive-t-on à pondre pareil camembert ?...”.

 

Me retrouvant, enfin, devant le livre ou, plutôt, l’opuscule mis en vente sous le bandeau bleu Prix Goncourt, mon appréhension se confirma. Je sais : la qualité ne se jauge pas au nombre de pages. Alors, cent cinquante cinq pages, en gros caractères…


Insuffisant, toutefois, pour chanter l’épopée de Malalaï. Avant de le lire, je le savais déjà : j’étais bien face à un  “n’importe quoi” de fast food littéraire.

 

Adieu Malalaï, me suis-je dit, je vais avoir droit au “Sort Tragique de la Femme Afghane”, version islamophobe …

 

 

 


Suite (2) et fin.

 

 

 

 

 

(*)   Marc-Edouard Nabe, Nabe's Dream - Journal Intime 1, Editions du Rocher, 1991, pp. 239-240.

 

(1)   Rahimi, Atiq, Syngué Sabour – La pierre de patience, Editions P.O.L. (groupe Gallimard), 155 p., 2008.

(2)   Cf. ce site en anglais (précisons qu’il n’y a pas de tréma en anglais, le nom s’écrit en ce cas Malalai) : http://www.garenewing.co.uk/angloafghanwar/biography/malalai.php

(3)   Suisse : 41.285 km2 & 8 millions d’habitants - Afghanistan : 652.000 km2 &  31 millions d’habitants (+ ou -, compte tenu des massacres et déplacements de population actuels).

(4)   Centlivres-Demont, Micheline, Centlivres, Pierre, Et si on parlait de l’Afghanistan ?, Université de Neuchâtel, Institut d’ethnologie, Editions de l’Institut d’Ethnologie, Neuchâtel, Suisse, 1988. p. 288.

(5)   Engelhardt, Tom, "... We have become a nation of wedding crashers... wedding-obliteration...", in Five weddings and many funerals, Asia Times, 15 juillet 2008.

(6)   Baroud, Ramzy, Another Casualty of War – The Rights of Women in War Zones, Counterpunch, 21-23 novembre 2008, http://www.counterpunch.org/baroud11212008.html

(7)   Le Monde, La langue de la liberté, Editorial, 12 novembre 2008.

 

 

 

 

 





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5 septembre 2008 5 05 /09 /septembre /2008 10:36

 

 

 

" On croit mourir pour la patrie ;

  On meurt pour des industriels "

  Anatole France






Le 18 août 2008. Premiers résultats du renforcement du contingent français en Afghanistan : 10 morts, 21 blessés. Accessoirement plusieurs véhicules blindés et camions détruits (1). En une seule embuscade. Notons au passage : aucun officier, encore moins "officier supérieur", parmi les morts et les blessés...


Une gerbe de sentiments...


Tristesse devant ces jeunes morts, et blessés, dans une guerre qui ne les concernaient pas et ne concerne pas notre pays. Compassion, pour les familles endeuillées. Certains de ces soldats avaient des enfants en bas âge ou étaient dans l'attente d'une prochaine naissance. Ils ne les verront pas grandir, et ces enfants ne connaîtront jamais leurs pères...


Mais aussi, révolte face à l'injustice d'un tel gâchis humain, conséquence de l'incurie des responsables qui ont envoyé ces soldats à la mort. Et colère, car encore plus choquante l'exploitation médiatique et politique de leur mort par les cyniques de la nomenklatura. Dans l'hystérie d'une propagande poussée à l'extrême de la désinformation.



Manipulation des opinions et de la volonté nationales


"Ces hommes sont morts, car leur métier était de risquer la mort et de la donner". Ce fut l'oraison funèbre récurrente qu'on pouvait lire, ou entendre, dans nos médias, chez nos politiciens ou certains porte-paroles de l'Armée. Je suis toujours estomaqué devant l'ampleur sidérale de pareilles idioties. Il montre l'état de décérébration, ou de l'hypocrisie, de la caste politique et de sa propagande, avec en ligne de mire l'anesthésie de l'opinion publique.


Cet argument relève du mercenariat.


Non. Le métier de ces jeunes, de nos soldats, n'est pas de mourir, ni de donner la mort. Ce ne sont pas des mercenaires au service de causes et d'intérêts douteux ou mafieux. Leur métier est de "défendre la Nation". Ce qui est un tout autre registre. Au même titre que la vocation d'un ouvrier du bâtiment n'est pas de tomber d'un échafaudage, lui et ses compagnons, mais de construire un immeuble.


L'avez-vous remarqué ?... Comme toujours, ces irresponsables "va-t-en-guerre" prennent soin d'éviter d'envoyer leurs progénitures, du même âge que ces morts, en première ligne. Progénitures, au même instant, paisiblement investies de responsabilités, même si ce sont des nuls ou des voyous, dans des Conseils Généraux et autres sinécures publiques, dans les appareils des partis politiques, ou, tout simplement, dans des entreprises "amies" vivant grassement des commandes de l'Etat ou de sa protection...


Pourtant, il s'agit de "défendre la civilisation", à les entendre (2). Qu'attendent-ils pour donner l'exemple ?... Ne disent-ils pas que protéger la France et notre civilisation commence par l'occupation de pays lointains ?... Cela leur ferait voir du pays, à leurs chers rejetons... Mais non, bien au contraire, dans leur inébranlable culot, tous ces politiciens en rajoutent, n'hésitant pas à nous annoncer des morts prochaines, appelés pudiquement des "pertes"... Pas pour leurs familles, mais pour celles des autres. Pur exercice comptable.


Rompus aux tours de passe-passe, ils en profitent pour demander de nous taire. Exigeant le silence, pour marquer le deuil, autour du drapeau pour respecter nos morts... Sous le vernis de cette revendication d'union nationale, l'astuce est claire : chloroformer notre esprit critique, étouffer toute contestation, devant leur politique aussi imbécile que criminelle.


En fait, on retrouve les mêmes comportements, vocabulaires, rhétoriques, des guerres coloniales. Inusables... Toutes nos guerres coloniales se sont nourries, des années durant, de pareils mensonges. Indochine, Algérie, parmi les plus récentes. Justifier une occupation sous prétexte de défendre la France ou la Civilisation contre des barbares, banalisant ainsi : destructions, spoliations, tortures et massacres de civils. Pour éduquer, assurer le bonheur des sauvages, ne faut-il pas tout casser ?...


Face à l'évènement, à l'engagement militaire de la France en Afghanistan, nos politiciens, à part servir les habituels clichés démagogiques, incapables de la moindre analyse, n'ont cessé de répéter devant micros et caméras, l'air supérieur : "Il faut expliquer aux français"... Sous-entendu : nous allons les bourrer de propagande (3).


L'arrogance servant de camouflage au cynisme, assimilant les français à des singes incapables de comprendre le monde. Brandissant un argumentaire identique, les voilà prêts à refaire le coup du "vote" sur la Constitution Européenne : le fameux vote au Parlement.  La majorité de la population est contre l'engagement militaire en Afghanistan, mais nos "élus" vont s'arranger pour voter le contraire de ce qu'elle souhaite.


Comme en Grande-Bretagne. Les britanniques dans leur majorité, plus des deux tiers, sont hostiles à l'envoi de soldats en Irak et en Afghanistan. La caste politique a fait approuver cet envoi de troupes par le Parlement britannique, donnant ainsi une teinture démocratique à ces aventures guerrières.


Dans nos pays occidentaux, les citoyens souhaitent de la part de leurs élus, et des gouvernements, des engagements autrement plus exaltants et vecteurs d'avenir que des gesticulations guerrières porteuses de mort au service de causes inacceptables, coûteuses pour la collectivité, pour le plus grand bénéfice de quelques lobbies de l'armement, du pétrole ou des trusts miniers.


Ces aventures ne franchiraient pas un seul référendum, si elles étaient soumises à l'accord préalable du suffrage universel. Mais, nos politiciens s'en gardent bien. Contourner la volonté nationale par des manipulations du droit électoral ou constitutionnel, est devenu, à présent, la vocation de nos parlementaires...


Parlementaires incapables de percevoir les ravages en termes humains infligés à des populations martyrisées au nom de la Civilisation. Crimes de guerre succédant aux crimes contre l'Humanité. Quotidiennement.


Incapables de percevoir, tout autant, le naufrage d'une grande partie de notre propre jeunesse, en Occident. Celle dite "défavorisée", en premier lieu. Les héritiers de la ploutocratie régnante n'étant, comme par hasard, pas concernés...


J'ai vu, je vois, en plein centre de Londres, d'anciens soldats revenus d'Irak ou d'Afghanistan. Le soir, on peut les rencontrer autour de Leicester Square, et des stations de métro de West End, épaves imbibées d'alcool, brisées par leur vécu, sous l'uniforme, les atrocités commises sur ordre. Inaptes à se réinsérer dans une vie sociale, remplissant les prisons. La faute au "stress post traumatique", nous disent les professeurs Nimbus...


La population carcérale britannique est composée, à hauteur de 10 %, de vétérans d'Irak ou d'Afghanistan (4). Régulièrement, dans la presse britannique, surgissent des articles sur des blessés graves abandonnés, dès la fin de leurs relations contractuelles, avec à peine de quoi survivre dans une société où les riches sont immensément riches et les pauvres de plus en plus pauvres.


Au retour de ces saloperies coloniales, pour se reconstruire, certains vétérans militent au sein d'associations d'anciens combattants, contre ces guerres dévastatrices et injustifiées, telle la célèbre association US, The War Comes Home (5). Jusqu'à des officiers qui démissionnent ou accusent. Mais, beaucoup n'y arrivent pas...


Naïvement, la plupart s'étaient engagés dans l'Armée sur le fondement de belles publicités. Dans des économies dévastées par les délocalisations, l'institution militaire représente, souvent, le seul emploi possible. Ces jeunes signant des contrats d'engagement pour devenir des "smicards du casse-pipes". L'Armée puise ainsi, à son aise, dans l'immense réservoir humain que constitue le chômage. Jetant  et renouvelant ses recrues, après usage, comme un kleenex à oublier...


On ne peut accepter, en notre siècle, qu'avec des simulacres démocratiques, des manipulations de l'information, une propagande datant des siècles antérieurs, des "responsables" politiques et militaires envoient des jeunes soldats au casse-pipes, sans aucune précaution, ni réflexion. Sans aucun sens. Dans des guerres étrangères à notre destin collectif, justifiées uniquement par des mensonges.


Notre Armée n'est pas au service des intérêts d'un suzerain, USA ou autre, ni d'intérêts privés jonglant avec les comptes secrets des paradis fiscaux. Elle n'a pas pour vocation, non plus, d'obéir au doigt et à l'œil du premier satrape immature ... 


Une tactique n'a de valeur que celle d'une stratégie solidement arrimée sur les axes d'une orientation géopolitique. Cette dernière, servant de fondements aux intérêts de la collectivité nationale, et non pas à ceux d'une ploutocratie mafieuse repue de privilèges. La mort de nos soldats en Afghanistan, dans le respect qui leur est dû, doit être l'occasion à la Nation de condamner le comportement indécent de la nomenklatura qui nous "gouverne".


 


Le quotidien du peuple Afghan : enfants tués par les forces de l'OTAN. Sur la photo, quatre enfants de la même famille. Le plus jeune avait deux ans...


 

Une tactique criminelle d'imbécillité


Le 2 septembre dernier, le gouvernement a limogé le responsable de la sécurité en Corse à la suite d'une manifestation de nationalistes corses. Après être entrés dans la résidence secondaire de l'acteur-producteur Christian Clavier, ils avaient manifesté pacifiquement autour de sa piscine contre la spéculation immobilière dans la région. Motif : ce haut fonctionnaire n'avait "pas pris les mesures nécessaires pour protéger ce lotissement afin d'empêcher l'envahissement d'une propriété privée » (6).


Pour ce qui est de nos soldats tués en Afghanistan, on attend toujours les sanctions contre les responsables militaires qui "n'ont pas pris les mesures nécessaires pour protéger leurs hommes" afin d'éviter leur mort au combat. Aucune célérité. Pourtant, la "chaîne de commandement" dans l'opération militaire en cause, se révèle être une véritable "chaîne d'incompétence". Mais dans notre république, il semblerait qu'un "lotissement" ou des "people" aient plus de valeurs, aux yeux des politiciens, que les "smicards du casse-pipes" ...


Contrevérités, mensonges, sur le déroulement de cette opération militaire se multiplient. Nos courageux "journalistes d'investigation", nos Tintin au Tibet, n'arrivent pas à interviewer les 21 blessés soignés en France, et recouper les différentes informations. Sortis de leurs tartes à la crème sur les droits de l'homme en Chine ou ailleurs, les voilà subitement muets...


Sans entrer dans le détail, cette opération représente l'archétype d'une tactique criminelle d'imbécillité. Dans sa conception et dans son déroulement. Une certitude : des soldats tués dans une embuscade sont toujours le résultat d'une faute majeure de commandement, d'une incompétence crasse. J'insiste : toujours. Un mix de bêtise, de négligence, d'arrogance dans le mépris de l'adversaire, menant aux pires imprudences. Perdre des soldats dans la défense ou l'assaut d'une position est compréhensible. Perdre des soldats dans une embuscade : inadmissible.


Cette incompétence doit être sanctionnée, au même titre que des responsables d'entreprises seraient sanctionnés si leurs employés avaient eu un accident du travail mortel du fait de négligences dans l'organisation et la mise en place des moyens nécessaires à leurs travaux. Tous les officiers, ayant planifié et dirigé cette opération, sont à limoger. Tous.


Face à la désinformation, soyons précis : il ne s'agissait pas d'une "patrouille". Dispositif léger avec pour finalité la recherche ou la validation d'une information sur le terrain : présence ou pas de l'ennemi, etc. Une patrouille ne doit en aucun cas rechercher le contact. Si elle est "accrochée" par l'ennemi, elle doit rompre le combat et se retirer suivant des itinéraires et des points de regroupement planifiés, n'hésitant pas à se scinder en plusieurs éléments pour faciliter l'évitement.


Il s'agissait, ici, d'une "ouverture de route" : une colonne devait établir une jonction avec une autre, venant en sens inverse, sur une route qui n'était pas sécurisée. Les risques d'embuscade étaient particulièrement importants, avec des probabilités d'un combat de longue durée. Les premiers communiqués de presse étaient formels :

"Au sein de l'état-major de l'OTAN, à Kaboul, on confirmait, mardi soir, que la mission de ce convoi consistait à sécuriser une route jusque-là considérée comme dangereuse et peu fréquentée entre les districts de Saroubi, appartenant à la région de Kaboul où se trouvent des troupes françaises depuis 2002, et de Tag Ab, dans la province voisine de Kapisa où a été affecté le nouveau contingent envoyé cet été par la France."


Or, qu'apprend-on par quelques confidences de certains blessés, dans l'anonymat ?... Soldats à court de munitions ("...nous n'avions plus de munitions pour nous défendre..."), coincés pendant de longues heures sous le tir ennemi (de 13h30 jusqu'à la nuit), impossibilité d'obtenir le moindre soutien ou renfort pendant près de 4 heures, impossibilité d'évacuer les blessés avant 2h du matin, "... lenteur de la réaction du commandement et sérieux problèmes de coordination..." (7).


Compte tenu de l'ampleur d'une telle mission, toutes les précautions d'usage auraient dû être prises, pour ne lancer l'opération qu'une fois l'intégralité des moyens réunis : reconnaissance préalable aérienne et humaine, accompagnement du convoi par au moins un hélicoptère armé, approvisionnement en munitions, "appui feu" adapté au risque et au relief, etc.


On ne peut refaire l'opération. Les morts et blessés sont là. Mais, retenir trois premiers points d'analyse :


i)  Les responsables de l'OTAN en Afghanistan sont des nuls prospérant au sein d'une Tour de Babel. Véritable caricature des bureaucraties truffées de planqués privilégiés. Bénéficiant d'une rente de situation très lucrative, ils sont incapables d'une analyse objective de la situation, de coordonner les immenses moyens mis à leur disposition par les contribuables, au détriment de leur système de santé et de retraite, et d'assurer une solution rapide au conflit. Car, cette solution du conflit n'est pas militaire, mais politique. Leur intérêt, comme dans toute guerre coloniale, est de le prolonger (8). Pas le contraire.


ii)  A part dans les villes et leurs positions fortifiées, les troupes de l'OTAN sont aveugles et paralytiques. Le moindre déplacement prend des proportions titanesques. Un exemple très récent : pour livrer une turbine destinée au barrage de Kajaki (province d'Helmand), arrivée de Chine sur l'aéroport de Kandahar, l'OTAN a dû l'escorter avec 4.000 soldats soutenus par des hélicoptères et des avions. C'était le 3 septembre 2008... (9).

Nous sommes bien devant une guerre d'indépendance, un soulèvement national. Le déni de cette évidence est la source des désastres présents et futurs de l'OTAN dans ce pays.


iii)  Les officiers et officiers supérieurs de nos troupes sont à recycler. En particulier, ceux issus des troupes d'infanterie coloniale et parachutistes coloniaux. Le niveau d'incompétence dont ils ont fait preuve, dans l'organisation et la conduite de leur mission, démontre qu'ils sont déconnectés de la réalité Afghane.

Habitués à servir de garde prétorienne aux dictatures africaines (10), installées et gérées par nos gouvernements successifs, ils sont incapables d'établir la distinction entre une mission de "maintien de l'ordre" en Côte d'Ivoire, au Gabon, au Congo ou en Centrafrique, et une "guerre d'indépendance" soutenue par tout un peuple.

Il y a un univers entre tirer sur des manifestants sans armes dans les rues d'Abidjan ou de Bangui en semaine, jouer les bellâtres bronzés dans les clubs de coopérants racistes le week-end, et affronter les résistants d'une guerre d'indépendance en Afghanistan.


 

Une stratégie coloniale sclérosée


Il est vrai que cette tactique n'est que le reflet d'une stratégie coloniale sclérosée. En Afghanistan, nous retrouvons le tragique aveuglement du militarisme qui en est le support. Avec ses deux tares classiques :


i)  Le déni d'une guerre d'indépendance


Comme pour Napoléon et son état-major pendant la guerre d'Espagne, suivant le schéma de toute guerre de spoliation ou d'annexion, un homme luttant pour l'indépendance de son pays est considéré comme un "terroriste", un "insurgé". A partir de cet axiome, tout est permis. L'engrenage se met en place. "Un bon indien est un indien mort", disaient les massacreurs d'amérindiens...


Bombarder, massacrer, terroriser les habitants, défoncer leurs portes à coups de pieds et saccager leur peu de biens, de préférence la nuit. Quitte à vider le pays, les parquer dans des camps ou des réserves, les contraindre à fuir, à émigrer, pour ne garder que les "collabos" et la milice locale. La seule vision et le seul objectif étant d'assurer, ou de croire, que les "terroristes", les "insurgés", ne gagneront pas. Même s'il est impossible de tenir le pays, en dehors des villes.


Mais, tout n'est qu'une question de temps. La répression sauvage de l'occupant, renforçant la détermination de la résistance, l'indépendance finit par l'emporter, quelle que soit la disproportion des moyens en faveur des armées étrangères. Même s'il faut un siècle. Comme la Guerre de Cent Ans, quand la France s'est libérée de l'occupation anglaise.


Cette stratégie d'un autre âge, se dissimulant derrière une idéologie de la défense de la Civilisation, est une illusion. En notre siècle, usée jusqu'à la corde, il n'y a que des "stratèges paranoïaques" qui peuvent encore y croire.


Alors, dans leur mégalomanie guerrière, les états-majors gangrenés par cette mentalité coloniale, n'ont qu'un argument : toujours plus de moyens !...



ii)  Le mythe du manque de moyens


Les résistants Afghans combattent avec des moyens dérisoires : pas de casques, de gilets pare-balles, de lunettes de play-boys, de camions, de blindés, d'hélicoptères, de drones, d'avions, d'artillerie, d'artillerie anti-aérienne, d'hôpitaux, de satellites. Leur seul luxe : des mules et des ânes. Tout est artisanal. Tout se fait à pied.


Pourtant, ils mettent en échec les armées les mieux équipées du monde, comme ils l'avaient fait déjà contre les armées soviétiques. A armes égales, ils balayeraient ces armées de luxe, en quelques jours. Il leur suffirait d'avoir un armement anti-aérien, comme les américains l'avaient compris en distribuant des missiles sol-air Stinger à la résistance Afghane contre les soviétiques, et les troupes de l'OTAN seraient jetées hors du pays en un mois maximum. Qui dit qu'un jour ils ne seront pas dotés d'un matériel équivalent ?...


Leur force ?...


Ils se battent pour l'indépendance de leur pays. Avec leurs ongles, avec leurs dents, s'il le faut. Comme les Espagnols sous l'occupation de ce qui était alors la première armée du monde, celle de Napoléon. Comme tous ceux qui ont lutté pour la liberté de leur pays. Comme nous le ferions nous-mêmes, français, si nous étions occupés. N'est-ce pas ?...


En face, les soldats de luxe de l'OTAN ne sont que des "envahisseurs". Dans leur inconscient, malgré le bourrage de crânes, ils le savent. Sans légitimité, ils ne peuvent avoir le moral nécessaire. Ce sont des loosers, des perdants, quels que soient leurs équipements de Superman...


Pour justifier, leur incapacité à maîtriser une guerre d'indépendance, les galonnés ne cessent de demander des moyens supplémentaires. Refrain habituel des guerres coloniales. Américains, Britanniques, Canadiens, Australiens, etc. Tous. Plus d'hommes, plus de propagande, plus de matériel. Matériel, si possible, le plus sophistiqué, le plus récent, le plus cher... Les lobbies de l'armement en frétillent.


Le lobby belliciste français, victime du syndrome du perroquet, ne cesse de le répéter aussi : "Plus de moyens !"... Mais, la France n'est pas en retard en termes d'équipement militaire, face à des combattants qui se déplacent à pied, avec des armes légères, pratiquement à mains nues, avec un armement artisanal.


Tout simplement, nos "stratèges" sont dans une impasse. Incapables d'anticiper. Incapables d'admettre que vaincre une nation, dans une guerre d'indépendance, est impossible pour un envahisseur. A moins d'en massacrer tous les habitants.


Se profile, alors, la tentation du génocide, accompli à doses homéopathiques...


 

Une géopolitique fanatique sans issue

 

La stupidité d'une stratégie fondée sur la répression coloniale d'une nation, par une armée d'occupation, est la conséquence d'une géopolitique sans vision sur l'évolution du monde. Si ce n'est la répétition des vieux schémas des guerres de conquête qui sont la caractéristique du monde occidental depuis le 15° siècle.


Les nomenklaturas au pouvoir, en Occident, sont inaptes à prendre en compte la rapide évolution des rapports de force. Les guerres de conquête ne sont plus admises dans un monde qui doit être géré comme un village, dans le respect mutuel de ses habitants. Le centre de gravité du monde bascule, l'Occident d'ici la fin du présent siècle ne sera plus qu'une puissance moyenne en interaction avec d'autres, aussi puissantes.


Ce n'est que dans le progrès économique partagé, pacifiquement, en muselant les lobbies bellicistes qui se nourrissent des contrats mafieux, que l'humanité pourra trouver un développement "équitable et durable".


Mais, pour ces castes privilégiées, avoir une vision sur les 30 prochaines années, et encore plus d'ici la fin de ce siècle, est hors de leur portée. "Après nous le déluge" pensent-elles, accrochées à leurs rentes et privilèges, concoctant sans répit un mélange explosif fait d'aveuglement mégalomaniaque sur leur propre puissance et de mensonges, avec pour résultat : le fanatisme colonial.


Cinq points permettent de mesurer, en Afghanistan, l'écart entre la réalité et le fanatisme sans issue prôné par les gouvernements occidentaux :


=>  Jamais un Afghan n'a lancé une quelconque attaque contre un pays occidental et n'est en mesure de le faire. Au contraire, c'est un pays qui lutte depuis plus d'un siècle contre des occupations étrangères successives.


=>  Ben Laden et son équipe, n'étaient pas Afghans. Mais, rappelons-le, des auxiliaires de la CIA, financés essentiellement par les USA et l'Arabie Saoudite, pour combattre les soviétiques en Afghanistan.


=>  L'affirmation qu'il y aurait un centre de commandement, de coordination, de formation et de support du "terrorisme international" en Afghanistan est une pure affabulation. Tout un chacun sait que cela est, techniquement et humainement, impossible à partir d'un pays ruiné, dénué d'infrastructures efficientes, notamment en télécommunications, en moyens de transport et de liaisons rapides.


=>  Les massacres quasi quotidiens de populations civiles commis par les forces de l'OTAN, s'apparentant à des châtiments collectifs et systématiques, décrédibilisent l'intervention de l'OTAN, non seulement en Afghanistan mais aussi dans le monde entier. Devant la répétition de ces authentiques crimes contre l'Humanité, même " le gouvernement de pacotille " mis en place par l'Occident se voit contraint de protester (11). Ces massacres ne font que renforcer la détermination de tous les Afghans, et la radicalisation de certains d'entre eux, pour chasser les troupes d'occupation de leur pays.


=>  L'aide internationale, telle qu'elle est actuellement gérée par les occidentaux en Afghanistan, est une colossale machine à corruption. Corruption, source de l'enrichissement effréné des castes politiques et militaires occidentales. Les potentats locaux ayant les miettes, le reste est ventilé dans des paradis fiscaux sur les comptes secrets idoines, comme pour l'Irak, l'Afrique ou ailleurs. Au détriment, répétons-le, des systèmes  de santé et de retraite des populations occidentales désinformées.


A partir de ces points de réflexion, le choix géopolitique de décision pour la France est simple :


i) Soit, nous respectons l'Afghanistan en tant que pays souverain, dans son indépendance, son droit à l'autodétermination, ses choix de société, et nous refusons de nous associer à une guerre coloniale et corruptrice. Sachant que c'est dans la paix et le développement que ses mœurs évolueront, comme les nôtres auront à évoluer sur d'autres plans.


ii) Soit, nous nous associons, en tant que vassal, à des entreprises impériales délirantes et suicidaires qui ne concernent pas notre nation. Ni dans son destin, ni dans les valeurs qu'elle prétend défendre. Engagés dans une répression sans fin, nous acceptons, en ce cas, de nous salir les mains dans le crime, le lent génocide d'un peuple.



Nous ne pouvons pas dire que nous ne savons pas... Par respect pour nos soldats morts en Afghanistan, nous nous devons, face à notre conscience collective et personnelle, de trouver le courage de dire : Non !


Sous prétexte d'une quelconque alliance, la France n'a rien à faire dans le mensonge, la corruption organisée, le crime de guerre, le crime contre l'humanité.


La France n'a rien à faire en Afghanistan.


Notre Grand Timonier nous délivre à intervalles réguliers ses Pensées, afin de nous guider, peuple ignorant, face aux bouleversements du siècle que nous vivons et que nous sommes supposés ne pas comprendre. Il conviendrait de nous les approprier, dans l'étendue de leur vision et la profondeur de leur analyse.


Ainsi, à tout politicien véreux, baderne militaire imbécile, ou "spécialiste" médiatique de la désinformation vendu au plus offrant, prétendant nous faire prendre une "guerre coloniale" pour la "défense de la civilisation contre la barbarie", reprenant une des expressions lumineuses de notre Phare de la Démocratie, n'hésitons pas à lui dire, sereinement mais fermement ...


... les yeux dans les yeux ... :


" Casse-toi, Pôv' Qong ...  "


 

 

 

 

 

 

 

 

 


(1)   D'après la résistance Afghane : 5 blindés et 8 camions détruits.
(2)   Voir la vidéo des commentaires de Patrick Devedjian, hiérarque UMP : http://www.lemonde.fr/web/video/0,47-0@2-823448,54-1087806@51-1049814,0.html
(3)   La mise en scène du "reportage" de Paris-Match (tellement "grosse ficelle" qu'il en est ridicule...), du 4 septembre 2008, sur des soi-disant "talibans", se laissant photographier complaisamment (apparemment on entre en contact avec eux comme dans une agence de tourisme...) par "une photographe", avec des uniformes récupérés sur des soldats français, est un excellent exemple des multiples coups tordus de la propagande officielle destinée à manipuler l'opinion publique. Activer le binôme "émotion-indignation" pour obtenir "l'adhésion" !... On se croirait revenu à la guerre d'Algérie, avec les "reportages" du même hebdomadaire sur les "fellagas"...
(4)   Record numbers of ex-soldiers in UK jails as combat trauma blamed - At least 8 500 former service personnel are in custody - nearly a tenth of the UK prison population, Jamie Doward, The Observer, dimanche 31 août 2008.
(5)   http://www.warcomeshome.org/wintersoldier2008, site intitulé The War Comes Home, réunissant les témoignages de vétérans US d'Irak et d'Afghanistan, condamnant les atrocités et la stupidité de ces guerres coloniales. D'autres sites, tenus par des associations de soldats ou d'anciens combattants, sont à visiter :
http://ivaw.org/, http://www.afsc.org/ , http://www.bcm-net.org/ , http://www.zmag.org/znet/viewArticle/7227, http://www.farmsnotarms.org/ , http://www.objector.org/ , http://www.girights.org/ , http://www.veteransforpeace.org/ , http://www.thewitness.org/agw/myers040704, html http://www.mfso.org
(6)  Le coordinateur des forces de sécurité en Corse démis de ses fonctions, AFP,  Le Monde, du 2 septembre 2008, http://www.lemonde.fr/web/depeches/texte/0,14-0,39-36804871,0.html, ainsi que http://www.lemonde.fr/societe/article/2008/09/02/le-m-securite-de-corse-limoge-apres-l-affaire-clavier_1090386_3224.html
(7)  Les soldats blessés racontent l'embuscade, les combats, les erreurs..., Jacques Follorou, Le Monde, 20 août 2008.
(8)  Un soldat français critique la désorganisation de l'armée française à Kaboul, Le Monde, 29 août 2008.
(9)  N'ayant pas peur du ridicule de cette opération, la propagande de l'OTAN annonce triomphalement : Coalition troops brave minefields and Taliban attack to bring electricity to 1.8m Afghans, Richard Norton-Taylor, The Guardian, 3 septembre 2008.
(10) C'est en séjournant dans les pays d'Afrique, dite "francophone", que j'ai découvert que nos troupes présentes sur place (dont les parachutistes de marine) étaient détestées, méprisées, par les populations, depuis des décennies, car au service des dictatures qui les oppressent et des multinationales qui pillent les ressources de leurs pays.
(11)  Afghanistan : Karzaï furieux contre la coalition, Marie-France Calle, Le Figaro, 25 août 2008, http://www.lefigaro.fr/international/2008/08/25/01003-20080825ARTFIG00292-afghanistan-karzai-furieux-contre-la-coalition-.php

 

 

 

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15 juillet 2008 2 15 /07 /juillet /2008 12:35

 

Sur l'écran, un point se déplaçait sur ce qui devait être un chemin, une route, à peine carrossables. Impossible à identifier pour un téléspectateur ordinaire. Un homme sur sa mobylette, en Afghanistan, nous commentaient ces militaires... Dans un documentaire, sur une des chaînes TV de la BBC.


Ces documentaires de propagande qui foisonnent en Occident, pour démontrer combien l'argent des contribuables est efficacement et remarquablement bien utilisé. Evidemment, tout cela pour "lutter contre le terrorisme", et la "défense de nos valeurs démocratiques" gravement mises en danger par de barbares terroristes.


Car, c'est en Afghanistan, que se trouve la première ligne de défense de l'Occident, ne cesse de nous marteler la propagande.

 

 

Des pilotes de drones ...


Ces spécialistes, tous officiers, dont une femme, britanniques et américains, pilotent des drones. Ces avions sans pilote à bord, qui volent au-dessus du pays. Pratiquement, nuit et jour. Installés au Nevada, cet Etat des USA, plus connu pour sa célèbre capitale du jeu, Las Vegas, que pour ses centres de pilotage de drones. Ils dirigent ces engins, décollant d'un pays voisin de l'Afghanistan et le survolant, depuis l'une des multiples bases occidentales en Irak, au Pakistan, ou autre pays vassal...

 

 

A distance, à partir du sol, à des milliers de kilomètres. Dans un local, climatisé, bardé d'écrans, comme une salle de la NASA. Le tout coordonné par satellite. Fiers de leur appareillage électronique, sophistiqué. Pour eux, à la pointe de la science et de la technologie. En résumé, à la pointe de la "Civilisation"...


Nous étions, donc, en train de suivre cet Afghan à mobylette. Point minuscule. Les spécialistes nous démontrant, bravaches, que rien ne pouvait échapper à la vigilance de leur surveillance. Ce point zigzaguant, probablement pour éviter creux et bosses d'une chaussée inexistante.


Brusquement, sur l'écran, apparaît un champignon, énorme, à la place du "point".


Rayonnants de fierté, les "spécialistes" nous apprennent que ce champignon correspond à l'impact d'un missile. Embarqué sur le drone, il venait d'être lancé par un des leurs, à partir d'une console. Comme dans un jeu vidéo.


Etaient-ils certains qu'il s'agissait d'un terroriste ? Cet Afghan était-il seul ou accompagné ? Quand on sait que dans ces régions une mobylette sert souvent de véhicule familial... Allait-il au marché avec un de ses enfants porté par sa femme, dans les bras ou enveloppé sur le dos ? En quoi, une mobylette et son conducteur menaçaient-ils l'Occident et ses "valeurs" ?...


De toute façon, à les écouter, au-delà d'une personne en Afghanistan, il s'agit d'un rassemblement de Talibans, de terroristes, de coupeurs de têtes, ou de militants. Dans le pois chiche cervical de ces tueurs électroniques, un conducteur de mobylette ne peut être qu'un chef Taliban. Et, le pays est considéré par les forces d'occupation occidentales, comme un champ de tir à vu et sans sommation...


Les pilotes de l'OTAN, c'est connu, s'amusent, entre autres facéties, à faire des cartons sur les fêtes de mariage (1), à tel point que des intellectuels américains se lamentent de voir leur pays devenu une nation "d'écraseurs", de "massacreurs", "d'effaceurs" de noces (2)...


Pas le genre, chez ces pilotes de drones, d'avions, ou d'hélicoptères, à avoir les scrupules d'un officier tel qu'Ehren Watada. Même pas le commencement d'un doute. Ce "point", sur un écran, n'était tout au plus qu'un cobaye pour tester leur "système d'armes", leur matériel de télécommunication et leur cohésion... Un simple "point" qui n'aurait pas dû être là, ce jour là... Fatalité...


La satisfaction du devoir accompli. La mobylette et son conducteur venaient, tout simplement, d'être réduits en cendres. « Obliterated », suivant l'expression favorite de nos amis anglophones : "rayé de la carte" (3). Nous venions d'assister à un crime de guerre, un crime contre l'humanité.


Et ces fanatiques, robotisés, rouages d'une machine militaire et d'une idéologie coloniale qui les manipulent, en étaient gonflés d'orgueil.

 

 

 ... Au tailleur de pierre

 

Dans un filon identique, récemment, les TV françaises montraient des soldats français à l'entraînement à Barcelonnette, dans le massif montagneux des Alpes. Dans le cadre d'une préparation avant leur prochaine affectation en Afghanistan. Pour renforcer le contingent des troupes françaises déjà présentes dans ce pays.

 

 

A l'un d'eux, fut posée la question : comment vivait-il sa prochaine mission en Afghanistan ? Ce brave troufion, bourré de propagande jusqu'au casque, nous recrachait sa leçon : il partait défendre la France, car c'est là-bas que commencent les "frontières de la France". Il faut détruire les terroristes dans leur base arrière...


Persuadé que, dans une caverne avec des écrans, des cartes, comme dans les films de James Bond ou les romans de gare à la SAS, des terroristes implacables ne cessent d'élaborer des plans pour détruire les "valeurs" de la République et de l'Occident. Il partait en Afghanistan pour "casser du Taliban", comme ses prédécesseurs partaient casser du "Viet" en Indochine, ou du "Fel" en Algérie.


La logorrhée coloniale repue de sa bonne conscience, indécrottable de la mentalité occidentale, de siècle en siècle, relookée...


Analphabète de la réalité du pays, il ignore que les Afghans se fichent complètement de la France. Beaucoup ne savent même pas où elle se trouve et ne cherchent pas à le savoir. L'hiver dernier, ils crevaient de froid et de sous-alimentation, comme aujourd'hui ils crèvent de chaleur et de sous-alimentation. Dans un pays où toutes les infrastructures ont été détruites.


Ils veulent vivre en paix, dans un pays libre. Ils ont combattu pendant des siècles pour leur indépendance. Infligeant les pires désastres à l'armée britannique au 19° siècle. Ils ont combattu les soviétiques et, à présent, ils combattent les occidentaux. Ils vont vaincre les occidentaux, comme ils ont vaincu les soviétiques.


Cet endoctrinement me ramenait à la célébration d'un cinquantenaire (4) : l'envoi de la lettre de Marc Sagnier, en date du 4 mai 1958, au président de la république française de l'époque. Il lui avait signifié, en tant que citoyen en uniforme, son opposition à la guerre coloniale en Algérie :

"... J'ai pris la décision de vous informer de mon refus d'y participer (à la guerre d'Algérie) car ma conscience m'ordonne de ne pas faire la guerre à un peuple qui lutte pour son indépendance..."


Marc Sagnier n'a pas déserté, mais a affronté l'institution militaire qui a tout fait pour le briser. La réponse a été rapide. Embarqué de force, interné à Bir El Atar, il était confiné dans un puits 22 heures par jour... Sans jugement, sans condamnation. Même pas par un tribunal militaire. Après un passage à Tébessa dans un établissement disciplinaire il fut envoyé au bagne militaire de Timfouchy, au fin fond du désert algérien, à 400 km au sud de Colomb-Béchar. Dont il ne sorti, épuisé, qu'après 11 mois de traitements inhumains (5).


De son métier : tailleur de pierre, spécialisé dans les monuments historiques, avant d'être mobilisé pour "défendre la France et la civilisation". Pour lui les valeurs qu'il pratiquait ne pouvaient s'accommoder de cette propagande primaire, de l'injustice et de l'horreur. Son père, ancien résistant au nazisme qu'il a combattu, disait de lui : "J'approuve l'attitude de mon fils et j'ajoute que j'en suis fier".


La censure a longtemps bloqué la publication des 153 lettres qu'il a envoyé à ses parents, souvent grâce à des complicités. Ainsi que le courrier de solidarité qui lui était envoyé de toute la France. Aucun film, aucun documentaire, aucune biographie. Sur lui et d'autres, qui ont partagé la même conviction.


On n'en parle jamais, mais plusieurs soldats français ont lutté contre ce conflit colonial, refusant de tuer des populations qui choisissaient l'indépendance. Ils ont payé cette "dissidence" au prix d'internements dans des goulags, sans jugement, sans condamnation : Alban Liechti, Jean Clavel, Voltaire Develay, Lucien Fontenet, Paul Lefebvre, Max Bergeron.


Il manque, en France, un Soljenitsyne décrivant les goulags où étaient enfermés ces "dissidents" opposés à l'idéologie coloniale. Luttant contre l'utilisation de nos forces armées dans ce qui n'a rien à voir avec la défense de notre nation et de ses valeurs. S'opposant au dysfonctionnement de nos "institutions démocratiques", où l'armée n'est plus l'armée du peuple mais une armée de professionnels, comme sous l'Ancien Régime, chargée d'exécuter les guerres décidées par les monarques. 


Flonflons, feux d'artifice, défilés de troupes, le 14 juillet n'est plus la fête de la fin de l'injustice sociale et économique de l'Ancien Régime. Progressivement, elle est devenue la fête de l'armée. Non pas la célébration d'une armée nationale, mais la glorification des nouvelles guerres coloniales...


En ce 14 juillet, je pensais à ces soldats, à Marc Sagnier et ceux qui ont partagé sa lutte. A ces hommes courageux qui n'ont pas marchandé les valeurs portées par leur conscience avec les clichés de la propagande coloniale.


Ils avaient compris que les "frontières de la France", ou de la "Civilisation", sont en chacun de nous. Elles ont pour bornes : le respect de soi dans le respect des autres.


Respect de leur indépendance, de leur liberté.


Respect de la dignité humaine.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(1) Les derniers "cartons" des pilotes de l'OTAN sur des fêtes de mariage en Afghanistan, rien que dans la seule province de Nangarhar, la semaine dernière : 47 personnes dont 39 femmes et enfants dans une première opération, et 23 personnes tuées dont la mariée, dans un seconde opération. Les deux ont été qualifiées par les occidentaux d'opérations contre des groupes de "militants" : http://www.alertnet.org/thenews/newsdesk/ISL238847.htm

(2) "... We have become a nation of wedding crashers... wedding-obliteration...", in Engehardt, Tom, Five weddings and many funerals, Asia Times, 15 juillet 2008.

(3) Au passé, du verbe To Obliterate : annihiler, oblitérer, effacer, détruire, rayer de la carte (Harrap's Shorter - Dictionnaire). Mot employé par Hillary Clinton, pendant sa campagne électorale, pour en menacer l'Iran. Très en vogue chez les "ziocons"...

(4) Bulletin France El Djazaïr, n° 10 - Juin 2008, Directeur de la publication Djouder Moussa, 7 rue de Montaury - 30900 Nîmes.

(5) Marc Sagnier, le reste de sa vie, a enduré les séquelles de ces traitements. Il est mort, en janvier 1995, à l'âge de 58 ans.

 

 

Photos de drones. Source : http://www.onera.fr/conferences/drones/


 

 

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3 janvier 2008 4 03 /01 /janvier /2008 18:40


"It is an alarming reflection of how widespread is the ignorance of Islam in general and of Pakistan in particular". 


Benazir-Bhutto.jpg
 
 
 
Je traduis cette phrase de William Dalrymple, me revenant face au tsunami médiatique provoqué par l’assassinat de Benazir Bhutto :
"C’est une inquiétante représentation de l’étendue de l’ignorance sur l’Islam, en général, et sur le Pakistan, en particulier".
 
Elle est extraite de sa cinglante critique du livre de BHL, " Qui a tué Richard Pearl ? ", écrite il y a quatre ans dans la prestigieuse "New York Review of Books" (1).
 
Ecossais, partageant sa vie entre Delhi et Londres, William Dalrymple, est un des rares "occidentaux" à connaître cette région sur le bout des doigts. Quand, je dis « connaître », c’est en  avoir assimilé l’histoire et la civilisation, saisi tous les enjeux, rouages, rapports de force, codes, interactions, manipulations… Rien à voir avec les visons schématiques des "correspondants permanents", ou aléatoires, des médias, ou des diplomates, chargés de préparer la "soupe" de la désinformation.
 
Ereintant ce livre de haine ("book of hate") (2), il démontre combien il est truffé de simplismes, d’amalgames, d’erreurs historiques et matérielles, se révélant l’exemple même de l’indigence dans l’analyse. Un pur produit de propagande "néocons". Diabolisation du Pakistan, dans un racisme et une paranoïa violemment antimusulmane.
 
Depuis, discours et clichés n’ont pas varié d’un micron.
 
 
La Glorification de la Ploutocratie Prédatrice
 
Les médias occidentaux ont tous pleuré la mort d’une "démocrate". Les mêmes qui ne cessaient de postillonner, pendant des semaines, toutes les calomnies possibles et imaginables, sur la volonté supposée de "dictature" de Chavez. Président légitimement élu, respectant les décisions de ses électeurs, même les résultats aux référendums qui, a priori, ne lui conviendraient pas…  Les mêmes, qui ne cessent de nourrir les campagnes diffamatoires, à longueur d’année, à l’égard d’un autre chef d’Etat régulièrement élu : Poutine
 
Subitement, les voilà tressant des lauriers, dans la glorification du culte de la personnalité le plus primaire, à "l’héroïne de la liberté", à "l’incarnation de la modernité face à la barbarie", et autres tartes à la crème…  Sans esprit critique, mesure, restriction, réflexion, recoupement d’informations. La ruée, la bousculade, dans la flagornerie la plus servile…
 
Comment qualifier la sclérose intellectuelle des castes dirigeantes occidentales et leurs médias ?... Dans une obstination tragique, conduisant à tous les aveuglements …
 
Certes, aucun objectif politique ne peut justifier le meurtre de Benazir Bhutto. Encore moins, le respect de la dignité humaine et la morale. Par sa symbolique, cet acte mérite, toutefois, d’être examiné dans son contexte géopolitique, pour en décoder le sens dont il est inévitablement porteur. Car il clôt une année et en ouvre une autre. Année, ou plutôt décennie, devrait-on dire.
 
En fait, sens ou non-sens ?
 
A qui profite le crime ?  Personne ne le saura. Même pas, les circonstances exactes de son assassinat. Beaucoup y avait un intérêt. Pas obligatoirement, ceux désignés à la vindicte journalistique : Al Qaïda, et autres mythes commodes ou fumeux, comme les lapins surgissant du chapeau du magicien… Seul élément d’information certain : cela s’est passé dans une des villes les plus surveillées et les plus sûres du Pakistan : Rawalpindi. S’y trouve le Quartier–Général de l’Armée.
 
Le retour de Benazir Bhutto s’inscrivait dans un simulacre démocratique. A elle, le rôle "d’opposition" et le poste de premier ministre, aux militaires le poste de Président. Il convenait de donner une couleur « civile » à une des dictatures militaires les plus dures de la planète afin de mieux dissimuler, à l’opinion internationale, la réalité du pouvoir : entièrement entre les mains des occidentaux.
 
Elle avait, au préalable, multiplié les gestes d’allégeance aux "ultras" américains. Promettant d’assurer toutes leurs satisfactions. Entre autres, celle de livrer "pour interrogation" les scientifiques pakistanais concepteurs de la force nucléaire pakistanaise. Quand on sait ce qu’ "interroger" veut dire, chez ces gens-là… Il fallait du culot. Allégeance aussi, bien évidemment, aux extrémistes sionistes. N’avait-elle pas déclaré qu’elle "admirait" Israël (3) ?... Moyennant quoi, son visa de retour d’exil avait été délivré.
 
Au Pakistan, on retrouve dans ce Bal des Maudits, deux acteurs principaux : les grands propriétaires féodaux (4) et l’Armée. Deux autres acteurs sont absents : les pauvres et la bourgeoisie. Ils sont exclus, et du pouvoir, et du débat politique. Schéma récurrent dans la plupart des pays en développement, notamment en Asie et en Amérique latine. Mais, c’est l’absence de ces acteurs majeurs qui va déterminer l’avenir du Pakistan…
 
 
 
La Féodalité « Glamour »
 
Benazir Bhutto représentait l’archétype de ces "élites" détestées, dans les pays non occidentaux, en dehors de leur clientèle électorale lorsqu’elles pratiquent l’action politique. Belle femme, très jet set, diplômée d’Oxford et d’Harvard, elle avait tout pour séduire les classes dirigeantes occidentales et leurs médias. Elle avait reçu leur label : "westernized" (occidentalisée)…
 
Parlant l’anglais mieux que le citoyen américain ou britannique lambda, tout en étant incapable de maîtriser la langue de son propre pays : l’ourdou. Encore moins, le sindhi, la langue du Sind, région du Pakistan où sa famille richissime possède d’immenses propriétés, spécialisées dans la culture du coton notamment.
 
Ceci explique sa totale identification aux riches féodaux latino-américains. La résidence du premier ministre, construite sur ses instructions du temps où elle occupait cette fonction, a repris à l’identique le modèle d’une hacienda mexicaine… Oui, avec des tuiles roses !... Ces immenses fermes, dont la superficie égale celle d’un département français. Adorant vivre dans le luxe, le déni de la civilisation et des traditions, même architecturales, de son pays. Sauf, quelques tenues et  postures démagogiques devant les caméras. La politique est aussi un spectacle. Alors, de temps en temps, jouer à …
 
William Dalrymple l’a qualifiée, dans un article récent, de "princesse féodale" (5). Féodale ? Oui, jusqu’au bout des cils. Trop gentil, à mon goût. Ajai Sahni est plus carré dans son approche (6) :
"… une responsable politique discréditée, foncièrement incompétente, sans aucun principe et corrompue…".
 
Personnage d’Eschyle ou de Shakespeare, infatuée, mégalomane, assoiffée de pouvoir et de richesses, elle aurait fait assassiner son frère, Murtaza (7), qui voulait prendre la tête de son parti : le PPP - Pakistan People's Party (8). Comme dans Les Euménides (9), les femmes liées à Murtaza se transformeront en Erinyes. La poursuivant de leurs imprécations et de leur vengeance. Sa belle-sœur, Ghinwa et, bien sûr, sa nièce, la propre fille de son frère, Fatima. Même sa mère, qui s’est toujours demandée, d’après ses propres termes, comment avait-elle pu nourrir une telle "vipère en son sein"…
 
Cette "démocrate" avait, en effet, décidé de se faire élire présidente "à vie" de ce parti. Pourquoi se gêner, puisqu’il est financé par la fortune familiale ?... Le PPP est avant tout un "family business" : propriété du clan Bhutto !
 
Mais, "la vie" joue de ces tours…
 
Ainsi, son enterrement à peine terminé, ce sont le mari et le fils qui ont été "désignés" co-présidents du parti. Le fils a 19 ans… Désignés par qui, comment, suivant quels critères, procédures, programme, durée ?... On ne sait pas. Il y a des miracles : la "génération spontanée" existe en politique… Oui, pourquoi se gêner ? Cela s’appelle être "féodal décomplexé"…
 
A deux reprises, elle a accédé à la fonction de premier ministre (10). A chaque fois, elle a été destituée pour corruption. Sa prévarication et les excès effrénés de son clan, dans la chasse aux commissions et les détournements, en avaient choqué plus d’un. A chacune de ses mandatures, Transparency International a classé le Pakistan parmi les trois pays les plus corrompus du monde. Les pakistanais, dans leur majorité, ont pour boutade d’intituler ses passages stériles, en tant que premier ministre : "Même pas une route…". En ourdou, cela sonne mieux.
 
Son mari, Asif Zardani, était internationalement reconnu, dans les milieux d’affaires, par le sobriquet : « Mr 10 % ». Montant qu’il s’empressait d’encaisser sur tout projet d’investissement au Pakistan. Ses talents pour le "management" allait jusqu’à gérer, aussi, les prisons privées du PPP (11), où étaient torturés et même exécutés, après leur enlèvement, les opposants ou les dissidents jugés "dangereux" par les dirigeants de ce remarquable parti "socialiste"…
 
Benazir et son mari étaient, d’ailleurs, poursuivis pour un détournement de près de 2 milliards de dollars au détriment du Trésor de l’Etat. Deux milliards : l’arbre qui cache la forêt… Avec des enquêtes au Pakistan, en Suisse, au Royaume Uni et aux USA, afin d’identifier les différents comptes bancaires familiaux. La plupart des fonds détournés se trouveraient sur des comptes "offshore", dans les pays du Golfe, notamment à Dubaï où elle s’était réfugiée. Le gouvernement pakistanais, sous la pression des occidentaux, avait décidé "d’effacer l’ardoise" pour permettre son retour et, donc, son éligibilité.
 
Je ne pourrais pas clore le rappel de ces quelques faits, sans un dernier compliment : ce despote, en bijoux Gucci, avait un courage physique hors du commun… A tel point que je l’ai toujours considéré, au vu des risques courus, comme étant lié à sa mégalomanie. Se croire, comme dans la chanson de Jacques Brel, "… se croire deux secondes seulement …", invulnérable, ou mieux, lâchons le mot : "immortel"… Deux secondes de trop.
 
Témérité des grands dictateurs, la "fibre sociale" en moins. Staline ou Saddam, eux, avaient pris soin de créer l’enseignement et les soins gratuits pour tout le monde… Mais, ils venaient du peuple !... Que voulez-vous : on est "féodal décomplexé” ou pas…
 
 
 
L’aveuglement géopolitique de l’Occident
 
L’hystérie dithyrambique, à toute disparition d’une figure emblématique des oligarchies corrompues sévissant dans ses néocolonies, est révélatrice du degré d’aveuglement de l’Occident. Dans le cas du Pakistan, il commet trois erreurs majeures de prospective qui se retourneront, en permanence, contre lui :
 
 
i)  Une erreur conceptuelle en termes d’idéologie
 
Je voulais parler de "vision géopolitique", mais le niveau d’analphabétisme de nos dirigeants et "experts", la profondeur abyssale de leur imbécillité, sont tels en la matière, que je me contente du mot passe-partout : idéologie.
 
Quelles vision et action mettent-ils en œuvre ?... Tout simplement, la vieille idéologie de la domination coloniale. Revue et corrigée, pour se vouloir "moderne et porteur de valeurs", par une régression conceptuelle de dix siècles : les guerres de religion et le "clash" des civilisations. Les idées et politiques du XI° siècle…
 
Scotchés aux obsessions des extrémistes américains et sionistes, ils veulent « casser » le Pakistan comme ils l’ont fait de l’Irak, du Liban, et souhaitent le faire de l’Iran. Enfermés dans leur paranoïa religieuse, ils ne peuvent supporter l’idée d’un pays musulman maîtrisant les nouvelles technologies, en particulier l’atome et l’aérospatial. Ils prétendent donc administrer ce pays comme une colonie, le démembrer en plusieurs entités rivales, sous prétexte qu’il présenterait un danger pour la paix dans le monde. Pour cela, ils soutiennent une caste corrompue et mettent tout en œuvre pour empêcher l’expression et l’organisation démocratiques du pays.
 
C’est oublier une évidence : ce qui était peut-être réalisable dans un pays à faible population comme l’Irak, à peine 30 millions d’habitants avant sa destruction, sera certainement impossible avec le Pakistan. Pays de 170 millions d’habitants, dont la population dépassera celles du Brésil et de la Russie en 2020.
 
A l’opposé d’une géopolitique win-win, “gagnant-gagnant”, l’Occident en est réduit, pétrifié par son dogmatisme “néocons”, à agir avec la mentalité de la brute stupide : “je gagne, si tu perds”…
 
 
 
ii) Une erreur d’appréciation en termes de "géoéconomie"
 
Que les extrémistes occidentaux le veuillent ou non, le Pakistan est un grand pays, dont le rythme de développement économique est de 6 à 7 % par an. Avec deux records battus en 2007 : un PNB de 500 milliards de dollars (465, d’après les premières estimations) et des investissements étrangers de 7 milliards de dollars (le prévisionnel était de 5 milliards). Ce qui fait du Pakistan un des pays les mieux placés sur le plan de l’appréciation du crédit, par les agences internationales de notation. Autrement dit, il est “bankable”, et de plus en plus d’étrangers y placent leurs “billes”…
 
Ce développement économique, malgré les difficultés et tensions politiques, ne peut s’accomplir que grâce à une classe moyenne d’un extraordinaire dynamisme. Car, contrairement à la propagande occidentale et aux clichés à la BHL, le Pakistan est loin d’être un ramassis de barbus,  les “rage boys”, endoctrinés dans des madrasas, passant leurs journées à hurler des slogans antioccidentaux et à brûler des drapeaux américains…
 
Le Pakistan a une qualité d’encadrement remarquable, supérieure à celle du Brésil par exemple : ingénieurs, techniciens, gestionnaires, professions libérales, PME-PMI, en particulier. Dans les domaines les plus pointus : énergie, atome, télécoms, aérospatial, informatique, etc.
 
Cette classe moyenne, industrieuse et talentueuse est, malheureusement, exclue du pouvoir politique. Comme on a pu le voir récemment avec la révolte des juges, réprimée dans la violence par le pouvoir militaire. A cette bourgeoisie moyenne, peut être rattaché l’encadrement de l’armée, aux postes subalternes : sous-officiers, et officiers de rang lieutenants et capitaines. Qui ne partagent pas les comportements corrompus d’une partie de l’oligarchie militaire, généraux et autres hauts gradés.
 
Tenue à l’écart du débat politique, cette classe moyenne est invisible des médias. Mais, c’est le Pakistan d’aujourd’hui et, surtout, de demain. C’est donc le cœur de cible des extrémistes occidentaux.
 
Du fait de leur persécution dès qu’ils expriment une volonté politique, par les féodaux et les militaires, beaucoup d’entre eux émigrent et constituent une diaspora dans les pays anglo-saxons, où ils sont très appréciés par leur sérieux professionnel. A Londres, par exemple, il n’est pas rare de trouver des chauffeurs de taxi pakistanais qui sont, dans leur pays, des cadres supérieurs. Beaucoup arrivent, grâce la solidarité familiale, à s’installer : pharmaciens, médecins, commerçants, franchisés de fast foods, experts comptables, agences immobilières, etc.
 
Cela présente un double avantage.  Pour les oligarchies pakistanaises, féodaux et militaires : éliminer une opposition de valeur. Pour les “néocons” occidentaux : freiner le développement du pays…
 
 
 
iii) Une erreur de manipulation en termes de sentiment national
 
Le sentiment national au Pakistan est très fort. D’autant plus enraciné qu’il s’est forgé dans l’antagonisme et les conflits armés avec un voisin d’une force impressionnante : l’Inde. Les Pakistanais ont résisté à la volonté de puissance d’un géant, dont ils sont frères par beaucoup d’aspects et de liens séculaires. Ce n’est certainement pas pour accepter la mise sous tutelle du pays par les occidentaux. Livré, de surcroît, à une classe politique méprisée. Jamais !
 
Reste le radicalisme, religieux, minoritaire, condamné par la classe moyenne, qui est trop intelligente pour ne pas comprendre quel outil de manipulation il représente pour les colons occidentaux. Effectivement, à l’échelle du pays, il est extrêmement minoritaire, mais, la propagande occidentale ne montre que cela. Il recrute dans la paysannerie sans terre explosant à intervalles réguliers, à l’exemple de ce que nous avons connu dans notre propre Histoire, dans des jacqueries et des révoltes paysannes, criant le désespoir de sa condition. Il recrute aussi dans les révoltés de l’injustice sociale et économique des villes.
 
Paradoxalement ce radicalisme religieux est encouragé, instrumentalisé par les oligarchies et l’Occident. Fondé sur l’exploitation médiatique des violences et des peurs, tourne une mécanique que certains croient parfaitement rodée :
 
=> Les militaires, du fait de l’apaisement des tensions avec l’Inde, y voient le substitut rêvé d’une “menace” : sans ennemi extérieur, il convient de lutter contre un ennemi “intérieur”. Prétexte idéal pour justifier leur dictature au nom, à présent, de la  “lutte contre le terrorisme”.
 
=> Les féodaux, y trouvent la soupape de sûreté magique évacuant toute contestation, portant sur l’urgente mesure de redistribution des terres en faveur d’une paysannerie vivant dans l’extrême pauvreté.
 
=> Les “néocons” occidentaux : y construisent la justification de la mise sous tutelle du Pakistan, du démantèlement de son indépendance militaire et, en conséquence, de son indépendance tout court…
 
Ce schéma en vigueur est, en fait, rejeté. Ce rejet sera le vecteur des tensions, conflits armés,  et luttes souterraines entre ces trois factions, tour à tour alliées et rivales, et le reste de la population. La majorité.
 
Comme le réclament des esprits indépendants, tel Jacob Hornberger (12), qu’on arrête de se mêler des affaires intérieures du Pakistan. Qu’on laisse ce peuple libre, dans les choix de son autodétermination et qu’on cesse de soutenir les pires crapules à la tête de ce pays.
 
Et, le Pakistan sera un foyer de paix, auquel aspire chacun de ses citoyens.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
1.   Volume 50, n° 19, 4 décembre 2003. Les médias français connaissant les ravages de cette critique rédigée en anglais, dans un silence complice, en ont étouffé l’écho. "L’omerta" du milieu médiatique français a, ainsi, été respectée.
2.   Précisons que les parents de Daniel Pearl, ainsi que son épouse, ont condamné la teneur du livre de BHL. Estimant que cette incitation à la haine et la caricature du Pakistan qui en résultait, ne correspondaient ni à la réalité, ni à la considération que Daniel Pearl lui-même portait à ce pays, à sa civilisation et à sa religion. Là encore : silence du milieu médiatique…
3.  "(Quelques semaines avant sa mort) … elle m’a écrit pour me faire part de son admiration pour Israël et de son désir de voir une normalisation des relations entre Israël et le Pakistan, y compris par l’établissement de relations diplomatiques ”, [ She wrote me of how she admired Israel and of her desire to see a normalization in the relations between Israel and Pakistan, including the establishment of diplomatic ties ], Danny Gillerman, Ambassadeur d’Israël auprès de l’ONU.
4.  Environ 50 % des terres cultivables sont détenues par 2 % de la population. Parmi cette minorité, 5 000 personnes disposeraient de millions de paysans sans terre (Source : Banque Mondiale). Taillables et corvéables à merci, avec leurs bulletins de vote aux ordres de leurs "seigneurs"…
5.  Dalrymple, William, Pakistan’s flawed and feudal princess, The Observer, dimanche 30 décembre 2007.
6.  “… a discredited, demonstrably inept, compromised and corrupt leader ”. Sahni, Ajai, Myths and Realities About Benazir Bhutto and Pakistan’s Dark Future, Counterpunch, Weekend Edition, 31 décembre 2007.
7.  Comme dans Le Parrain. Abattu devant le domicile de Benazir Bhutto, à la sortie d’une "réunion de famille"…
8.   Parti affilié à l’Internationale Socialiste et, à ce titre, soutenu par le Parti Socialiste français !...
9.  Les Euménides, dernière pièce de la trilogie L’Orestie écrite par le tragédien grec Eschyle (≈ 525 – 456 av. J.C.). Les Erinyes représentent les esprits de la justice et de la vengeance.
10.  De 1988 à 1990 et de 1993 à 1996.
11.  Consulter, notamment, le rapport d’Amnesty International : "Pakistan : The Pattern Persists - Torture, Deaths in Custody, Disappearances and Extrajudicial Executions under the PPP Government".
12.  Hornberger, Jacob, Président - fondateur de la Fondation "The Future of Freedom Foundation", Stop Meddling in Pakistan ! Call Off the War Dogs at the New York Times, Counterpunch, Weekend Edition, 29 – 30 décembre 2007.
 
 
 
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